CHAPITRE 0 : INTRODUCTION
Les moyens de la fonction financière, mais aussi ses attributions, ont considérablement évolué en raison de la brusque modification de l’environnement financier au cours des dernières années.
De l’économie d’endettement à l’économie de marché financier
Le trait fondamental de l’évolution de l’environnement financier est le passage d’une économie d’endettement à une économie de marché.
Une économie d’endettement est marquée par la prédominance de la finance indirecte. Les agents à besoin de financement s’adressent essentiellement aux intermédiaires financiers (banques) pour satisfaire leurs besoins. Le rôle des marchés pour le financement des entreprises est relativement marginal. Les entreprises sont massivement endettées auprès des banques.
A l’inverse, une économie de marché financier est marquée par la finance directe : les agents à besoin de financement se financent directement auprès des agents à excédent de financement. Le rôle des marchés financiers est alors prépondérant pour assurer le financement des entreprises, car celles-ci satisfont leurs besoins de financement en émettant des titres auxquels souscrivent les ménages, éventuellement au travers de produits de placements mis au point et gérés par les intermédiaires financiers dont le rôle a également changé.
Les caractéristiques des marchés financiers contemporains
Ce passage d’une économie d’endettement à une économie de marché est marqué par les caractéristiques suivantes :
- une certaine déréglementation des marchés nationaux qui conduit à l’émergence d’un marché mondial, facilitant le financement au moindre coût par une extrême mobilité des capitaux mais favorisant la volatilité des marchés et la spéculation au risque de créer une économie financière à la logique déconnectée de l’économie réelle ;
- la titrisation qui permet de transformer en titres négociables sur les marchés des créances bancaires grâce à la création de nombreux instruments financiers adaptés aux besoins de financement des entreprises ;
- la désintermédiation qui est la conséquence directe de l’économie de marché : le marché met en contact directement les agents à besoin et les agents à excédent de financement ;
- la couverture des risques (principalement de taux et de change) grâce à la mise au point d’outils comme les options, les swaps, etc.
L’évolution résultante de la gestion financière
Compte tenu de cette évolution des marchés, la gestion financière a connu une évolution tout aussi marquée de :
- ses outils en raison du nombre et de la diversité des nouveaux instruments financiers ;
- ses activités en raison de l’importance prise par les tâches liées au processus presque permanent d’arbitrage qu’induisent ces nouveaux instruments financiers.
Une fonction en profonde mutation
Les deux attributions de base de la fonction financière (trouver des sources de financement, allouer les capitaux) ont donc été complétée par :
- des activités d’arbitrages en raison de la transformation des marchés permettant une gestion plus fine, mais aussi plus dynamique des coûts et des risques ;
- des activités d’ingénierie financière en raison de la globalisation des stratégies d’entreprise et du rôle de plus en plus important joué par les politiques de croissance externe (OPA, fusions,..) et les montages juridico-financiers de plus en plus sophistiques.
Si la fonction financière était dans le passé une fonction introvertie, parfois simple appendice de la gestion comptable, elle est maintenant une fonction aux activités largement ouvertes sur l’environnement.
0.3.2. La finance de marché
Au cours des dernières années, les conditions de financement et de gestion de la trésorerie ont connu une véritable révolution en raison des profondes et brusques évolutions du marché monétaire et du marché financier.
Grâce aux nouveaux produits financiers crées, tant sur le marché financier (obligation à bons de souscription, actions à dividendes prioritaire, etc.) que sur le marché monétaire (ouverture du marché aux entreprises avec notamment les billets de trésorerie), l’entreprise peut disposer de nombreux et divers moyens pour :
- d’une part lever des fonds de manière à assurer son financement :
- d’autre part gérer les risques et les coûts des divers financements
La fonction financière a évolué en conséquence. Dans cette économie d’endettement, le financier est un acheteur de capitaux chargé de négocier les conditions d’emprunt auprès des intermédiaires pour en minimiser le coût, alors que dans une économie de marché de capitaux, le financier est un vendeur de titres qui a pour objectif d’en maximiser le prix de vente.
De sorte que le financier est devenu un homme de communication car :
- pour se financer directement sur le marché, l’entreprise doit être connue, diffuser des informations à une fréquence plus élevée qu’autrefois et sous des formes les plus diverses selon que le destinataire est le grand public souscripteur ou les agences de notation qui évaluent le « papier » de l’entreprise ;
- pour gérer des outils financiers complexes, il faut un dialogue permanent avec les intermédiaires qui proposent ces produits et avec les différents services de l’entreprise qui génèrent les flux de liquidités.
Enfin, le décloisonnement des marchés de l’argent a provoqué une certaine globalisation de la gestion financière en rendant moins nette la distinction classique entre le financement de haut de bilan (gestion des fonds propres et des emprunts) et le financement de la trésorerie à court terme. Cette évolution est particulièrement nette dans les grandes entreprises où des successions de montages de court terme permettent d’assurer le financement d’opérations de haut de bilan comme des offres publiques d’achat (OPA) ou des cessions de filiales.
CHAPITRE I : LE SYSTEME FINANCIER
Pour prendre des décisions financières efficientes, il faut apprendre à comprendre le système financier qui donne en même temps des possibilités et des contraintes au décideur.
Ce chapitre propose un cadre conceptuel pour comprendre le fonctionnement du système financier, et comment il évolue.
I.1. QU’EST-CE QUE LE SYSTEME FINANCIER ?
Le système financier englobe les marchés, intermédiaires, sociétés de services, et toutes les autres institutions qui mettent en œuvre les décisions financières des ménages, des entreprises et des gouvernements. Parfois, le marché d’un instrument financier donné est situé en un lieu précis, par exemple le Matif (marché à terme international de France), le New York stock exchange, le Osaka options and futures exchange, qui sont des institutions situées à Paris, New York et Osaka, respectivement. Cela dit, souvent, le marché n’a pas une localisation spécifique : tel est le cas pour le marché de gré à gré (marchés hors cote) en actions, obligations, et devise, qui sont constitués uniquement d’ordinateurs et de réseaux de télécommunications liant les traders et leurs clients.
Les intermédiaires financiers sont définis comme des entreprises dont l’activité principale consiste à fournir des services et produits financiers. Ces institutions regroupent des banques, des compagnies financières, et des compagnies d’assurances.
Aujourd’hui, le système financier est globalisé. Les marchés et les intermédiaires financiers sont reliés par un vaste réseau international de télécommunications, de telle sorte que les transferts d’argent et les opérations sur les titres financiers peuvent pratiquement se poursuivre 24 heures sur 24 heures.
I.2. LES FONCTIONS DU SYSTEME FINANCIER
Les institutions financières différent généralement d’un pays à l’autre, pour un grand nombre de raisons (notamment la taille et la complexité des économies, les technologies disponibles, de même que des différences historiques, politiques et culturelles). Ces institutions changent aussi au fil du temps. Globalement, on peut distinguer six fonctions primordiales :
- Fournir des moyens de transfert des ressources économiques dans le temps, dans le monde, et entre les entreprises ;
- Fournir des moyens de gérer le risque ;
- Fournir des moyens de compensation et de paiement pour faciliter le commerce ;
- Fournir un mécanisme pour mettre en commun les ressources et pour subdiviser la propriété dans les entreprises ;
- Fournir une information sur les prix pour aider à la prise de décision décentralisée dans les différents secteurs de l’économie ;
- Fournir des moyens de gérer le problème des incitations, qui arrive quand une partie prenante d’une transaction a des informations que l’autre partie n’a pas, ou quand une personne agit comme agent d’une autre personne.
I.3. LES MARCHES FINANCIERS
Les trois types d’actifs financiers les plus courants sont les dettes, les actions, les produits dérivés. Les titres de dette sont émis par quiconque a besoin d’argent : les sociétés, les Etats, les ménages. Les actifs cotés sur les marchés de la dette comprennent ainsi les emprunts des sociétés, les emprunts d’Etats, les emprunts immobiliers, les crédits à la consommation. Les titres de dette sont aussi appelés titres à revenu fixe, car ils versent généralement des intérêts fixes. On parle aussi de titres de créance.
On peut classer ces titres de dette par leur échéance. Le marché de la dette à court terme (moins d’un an) est appelé le marché monétaire, le marché pour la dette à long terme est appelé le marché obligataire ( les titres de dettes à long terme étant des obligations). La somme du marché obligataire et des marchés d’actions est souvent appelée le marché des capitaux.
Les titres du marché monétaire sont essentiellement des titres qui rapportent un intérêt, émis par l’Etat (bons du Trésor) et des emprunteurs du secteur privé (billets de trésorerie émis par de grandes entreprises). Aujourd’hui les marchés monétaires sont globalisés (c’est-à-dire que leurs acteurs peuvent être internationaux) et liquides (la liquidité étant la facilité, en termes de coût, de rapidité, avec laquelle un actif peut être transformée en argent).
Les actions représentent le titre des propriétaires d’une entreprise. Ces actions, quand elles sont cotées, sont achetées et vendues sur les marchés d’actions ; quand les actions ne sont pas cotées, elles s’échangent entre les individus sur un marché de gré à gré, c’est-à-dire un marché qui n’est pas organisé (il n’y a pas de cotation disponible, pas d’institution qui surveille les échanges, et il y a souvent peu de vendeurs et d’acheteurs). Une action est une part de la société, et chaque action donne droit à la même part de propriété sur les actifs de la société.
Les actions représentent une créance de dernier rang (ou résiduelle) sur les actifs, c’est-à-dire que le détenteur d’actions a un droit sur les actifs une fois que tous les autres créanciers ont été remboursés.
Les actions présentent aussi un caractère de responsabilité limitée. Cala signifie qu’en cas de faillite, si la revente des actifs n’est pas suffisante pour payer tous les créanciers, les créanciers ne peuvent pas demander aux actionnaires de combler la différence.
Les produits dérivés sont des titres financiers dont la valeur est liée à (dérive de ) la valeur d’un ou plusieurs autres actifs (qu’on appelle sous-jacent), par exemple des actions, des titres à revenu fixe, des devises ou des matières premières. Leur principal intérêt est de servir d’outils de gestion du risque des actifs sous-jacents. En d’autres termes, un produit dérivé du dollar sert à gérer le risque de fluctuation du dollar.
Les produits dérivés les plus courants sont les options et les contrats à terme. Une option d’achat (ou call) est un titre qui donne le droit (mais pas l’obligation) d’acheter un actif à un certain prix et à une certaine date (ou avant une certaine date). Une option de vente (ou put) est un titre qui donne le droit (mais pas l’obligation) de vendre un actif à un certain prix et à une certaine date ( ou avant une certaine date). Tout l’avantage de l’option tient dans le droit qu’on se réserve d’agir ou de ne pas agir à la date donnée.
Les contrats à terme sont des titres qui donnent l’obligation à un contractant d’acheter, et à l’autre contractant de vendre, un actif à un prix fixé et à une date fixée. Ces contrats permettent aux contractants d’éliminer l’incertitude sur le prix futur de l’actif.
Le développement considérable des marchés financiers s’est accompagné d’un enrichissement de son rôle :
- financement des sociétés cotées et de l’Etat grâce à l’épargne publique ;
- investissement : de nombreux investisseurs interviennent régulièrement sur ce marché
- évaluation des sociétés cotées. La valeur boursière ou capitalisation boursière d’une société est connue à tout moment ;
- prises de contrôle et regroupements : acquisitions, OPA, OPE ;
- récupération partielle de la valeur d’une société par ses fondateurs lors de l’introduction en bourse d’une partie des titres ;
- couvertures face à certains risques (risque de taux, risque de change…) grâce aux marchés dérivés.
I.4. ELEMENTS DE GESTION DE PORTEFEUILLE
I.4.1. Les principaux actifs financiers
I.4.1.1. Les actions
Une action est un titre de propriété représentant une partie du capital d’une société. Elle donne le droit de percevoir une part des bénéfices sous forme de dividende et de réaliser éventuellement une plus-value au moment de sa cession. Elle permet également d’influer la gestion de l’entreprise grâce au droit de vote.
I.4.1.2. Les obligations
Ce sont des titres de créances donnant le droit au versement périodique d’un intérêt et au remboursement du capital. Ce sont dans la majorité des cas, des titres à revenu fixe, le taux d’intérêt étant déterminé à l’émission et ne variant pas par la suite. Les obligations sont émis par l’Etat, les collectivités du secteur public ou semi public (région, département, villes, entreprises publiques), ou par des entreprises privés.
I.4.1.3. Les options
Une option est un contrat qui permet à son acquéreur de disposer du droit, et non de l’obligation, d’acheter ou de vendre un actif (le sous-jacent), à un prix déterminé à l’avance (le strike), jusqu’à une certaine date. En contrepartie, l’acquéreur de l’option doit verser une prime à celui qui lui vend. Le vendeur d’une option est dans la situation inverse. Il est obligé d’exécuter la volonté du possesseur de l’option.
I.4.1.4. Les warrants
Les warrants sont des valeurs négociables. Un warrant est une option qui donne le droit, et non l’obligation, d’acheter ou de vendre un actif (sous-jacent), à un prix prédéterminé et pendant une période donnée.
I.4.1.5. Les trackers
Les trakers sont des fonds (SICAV) indiciels, négociables en bourse et qui sont destinés à reproduire la performance d’un indice.
I.4.1.6. Les contrats à terme
Ces contrats permettent d’acheter ou de vendre un sous-jacent à une date future, mais à un prix déterminé dès à présent. Ils se distinguent des options par le fait que l’engagement est ferme. Il existe deux types de contrats à terme, les forwards et les futures.
I.4.1.7. Les titres de créances négociables
Un titre de créance négociable (TCN) est un titre qui est émis au gré de son émetteur, qui est négocié sur un marché réglementé et qui correspond à un droit de créance pour une durée déterminée. Il s’agit d’un titre qui permet à son émetteur de percevoir de l’argent pour une certaine période. En contrepartie, il verse des intérêts. Il est donc très proche d’une obligation. La principale différence est que les obligations sont émises en une seule fois, dans le cadre d’un emprunt obligataire, contrairement aux TCN qui peuvent qui peuvent être émis au fur et à mesure des besoins (« fil de l’eau »). A l’échéance, il est remboursé à son détenteur.
Le marché des TCN est divisé en plusieurs compartiments, selon la qualité de l’émetteur (Etat, banque, entreprise) et l’échéance du titre (court, moyen ou long terme). Parmi les différents TCN, on distingue les BTN (bons du trésor négociables), les BT (billets de trésorerie), les CDN (certificats de dépôts négociables), les BISF (bons des institutions et sociétés financières) et les BMTN (bons à moyen terme négociables).
I.4.2. Les indices boursiers
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Un indice boursier est une représentation de la valeur d’un ensemble de titres. Il permet ainsi de juger de la performance d’ensemble des titres qui le composent. Il peut également servir à mesurer la performance comparée d’un portefeuille ou d’un titre (benchmark) ou servir de support à des produits dérivés (options, futures, trackers).
Les indices sont essentiels dans la gestion d’un portefeuille d’actions car ils constituent un élément central dans l’appréciation de ses performances. Ainsi, réaliser une performance de 10 % lorsque l’indice retenu progresse de 20 % sur la même période n’a pas le même sens que la même performance réalisée alors que le marché performait de seulement 5 %. Dans le premier cas, le portefeuille a sous-performé alors que dans le second cas, il a sur-performé.
Un indice boursier est un indice d’évolution de la capitalisation boursière à périmètre constant.
Pour quantité de raisons, il peut être utile d’avoir une mesure du niveau global de la Bourse. Par exemple, les personnes qui détiennent un portefeuille boursier peuvent souhaiter comparer la performance de leur portefeuille à la performance globale de la bourse.
Tableau 1 : Les principaux indices boursiers dans le monde
Répliquer l’indice (ou indexer) est une stratégie de placement qui consiste à rechercher la même évolution (le même taux de rentabilité) qu’un indice donné. La logique de réplication de l’indice est fondée sur un principe simple : pour les investisseurs en moyenne, il est possible de sur-performer le marché boursier sur le long terme, c’est-à-dire qu’en moyenne, personne ne peut obtenir une rentabilité supérieure à celle de l’ensemble du marché boursier sur une longue période. Répliquer l’indice consiste pour un gérant de portefeuille à essayer de répliquer les rentabilités des différents investissements composant l’indice : le plus simple est d’acheter toutes les valeurs qui composent l’indice.
I.5. LES TAUX DES MARCHES FINANCIERS
I.5.1. Les taux d’intérêt
Un taux d’intérêt est un taux de rentabilité garanti, et il y a autant de taux d’intérêt différents qu’il y a de manières de prêter et d’emprunter de l’argent. Par exemple, le taux d’intérêt que des particuliers supportent sur des emprunts pour payer leur maison est appelé taux d’intérêt immobilier, le taux consenti aux entreprises sur leurs opérations d’exploitation est appelé taux d’escompte, le taux des obligations est appelé taux obligataires.
Le taux d’intérêt que ce soit pour un prêt ou une obligation, dépend de plusieurs facteurs, les trois principaux déterminants étant l’unité de compte, l’échéancier et le risque de défaut du prêt.
I.5.2. Les taux de rentabilité des actions
Quand vous investissez dans les actions, la rentabilité vient de deux sources. Premièrement, vous percevez des dividendes qui sont distribués par la société qui a émis les actions. Ces dividendes ne sont pas obligatoires contractuellement, ils ne peuvent donc être assimilés à des intérêts d’emprunt : en effet, les dividendes sont versés aux actionnaires suivant la volonté du conseil d’administration de l’entreprise.
Deuxièmement, vous gagnez (ou perdez) de l’argent en fonction de l’évolution du cours que vous détenez. Cette seconde source de rentabilité est appelée plus-value ou moins value.
Le taux de rentabilité de l’action r, est le suivant ;
R = (cours final – cours initial + dividende versé ) / cours initial
I.5.3. Les déterminants fondamentaux des taux de rentabilité
Dans une économie de marché, il y a quatre facteurs principaux qui déterminent les taux de rentabilité :
- la productivité attendue des investissements, c’est-à-dire les taux de rentabilité attendus des mines, usines, machines, stocks,... Plus les taux de rentabilité attendus sont élevés, plus les taux d’intérêt sont élevés ;
- L’incertitude sur la productivité future des investissements. Plus il y a un grand degré d’incertitude sur la productivité future des investissements, plus la prime de risque sur les actions sera élevée (c’est-à-dire les actionnaires auront une exigence de rentabilité plus élevée, pour rémunérer leur risque dû à l’incertitude) ;
- Les préférences temporelles des individus, c’est-à-dire les préférences des individus entre la consommation immédiate et la consommation future. Plus les individus préfèrent la consommation immédiate à la consommation future, plus les taux d’intérêt sont élevés ;
- L’aversion au risque, c’est-à-dire le montant que les individus sont prêts à dépenser pour réduire leur risque. Plus les individus ont une forte aversion au risque, plus ils exigeront une prime de risque élevée, et plus le taux sans risque sera faible.
I.6. LES MARCHES FINANCIERS EMERGENTS
On désigne sous l’expression générique marchés émergents trois catégories de marché boursier. Il peut s’agir des marchés boursiers qui, malgré leur existence ancienne, ont cessé de jouer un rôle important dans la mobilisation des capitaux. Ici, on peut citer le marché grec, le marché portugais ou le marché argentin.
Il peut aussi s’agir de marchés qui se sont développés dans les nouveaux pays industriels d’Asie et on peut citer ici le marché de Hong-Kong, le marché de Taiwan ou le marché de Singapour.
La troisième catégorie de marchés émergents sont des marchés qui se sont développés dans les pays en voie de développement soit pour accompagner le développement de ces pays soit comme conséquence de la vague de privatisation à la suite des prescriptions des bailleurs de fonds internationaux. Ici, on peut citer le marché de Lagos, le marché de Nairobi, le marché d’Abidjan, la BRVM, la BVMAC ou la Douala stock Exchange.
Sur ces marchés, les taux de rendement présentent généralement un certain nombre de caractéristiques par exemple :ce sont des marchés extrêmement volatiles, des marchés sur lesquels le risque pays est très élevé ; ce sont des marchés peu efficients et peu liquides. Dans ces marchés, l’hypothèse de la normalité de la distribution des taux d’intérêt n’est pas vérifiée. Les taux de rendement sur ces marchés ne sont pas nécessairement plus faibles que les taux de rendement des pays développés et malgré le risque très important rencontré sur ces marchés, certains auteurs montrent qu’il y aurait intérêt dans le cadre de la diversification internationale d’un portefeuille d’intégrer dans le portefeuille des actifs cotés sur les marchés émergents.
CHAPITRE II : EVALUATION DES ACTIFS
L’évaluation des actifs représente le deuxième des trois piliers analytiques de la finance moderne (les deux autres étant : la valeur de l’argent au fil du temps, et la gestion du risque). L’évaluation des actifs est au cœur de la plupart des décisions financières, pour les individus ou les entreprises. Les dirigeants d’une société sont censés prendre les décisions qui maximisent la valeur de l’entreprise (c’est-à-dire la richesse des actionnaires).
L’idée maîtresse de toute évaluation est la suivante : pour évaluer un actif donné, vous devez vous référer à des actifs comparables dont vous connaissez la valeur de marché. La loi du prix unique postule que des actifs équivalents ont le même prix.
II.1. PRINCIPE DE L’EVALUATION DES ACTIFS
II.1.1. La relation entre la valeur d’un actif et son prix
La valeur fondamentale d’un actif ou valeur intrinsèque est le prix que des investisseurs bien informés sont prêts à payer pour cet actif, sur un marché libre et concurrentiel.
On peut constater des différences temporaires entre le prix d’un actif sur le marché et sa valeur fondamentale. Les analystes boursiers, par exemple, gagnent leur vie en analysant les informations publiées par les sociétés, et en recommandant d’acheter celles dont le cours boursier (le prix de marché) semble bon marché, comparativement à la valeur fondamentale, et de vendre celles dont le cours est cher par rapport à leur valeur fondamentale.
La loi du prix unique postule que sur un marché concurrentiel, deux actifs équivalent vont tendre à avoir le même prix. La loi du prix unique est renforcée par un processus appelé arbitrage, c’est-à-dire, l’achat et la revente immédiate d’actifs équivalents, pour tirer un profit de leur différence de prix.
La loi du prix unique est le principe le plus important en finance. En effet, si jamais on constate des prix qui semblent aller à l’encontre de cette loi, c’est-à-dire des actifs apparemment identiques qui s’échangent à des prix différents, notre réaction ne sera pas de dire que la règle souffre des exceptions, mais plutôt de suspecter que :
- un facteur empêche, ou limite, la concurrence sur le marché considéré ;
- il existe des différences économiques (éventuellement non encore identifiées) entre les deux actifs.
La loi du prix unique s’applique à tous les marchés financiers, notamment le marché des changes. Le principe de l’arbitrage assure que, pour trois devises librement échangeables sur les marchés, il suffit de connaître deux cours de change pour déterminer le troisième : arbitrage triangulaire (or, euro et yen).
II.1.2. Les modèles d’évaluation
Evaluer un actif peut être très simple s’il suffit d’appliquer directement la loi du prix unique. Cependant, la plupart du temps vous ne connaissez pas le prix d’actifs exactement équivalents à l’actif à évaluer. Vous devez alors utiliser d’autres méthodes qui se fondent sur les prix d’actifs comparables, mais pas équivalents. La démarche quantitative qui consiste à évaluer un actif en fonction du prix d’actifs comparables et des taux d’intérêts s’appelle un modèle d’évaluation.
Le type de modèle d’évaluation à utiliser dépend de l’objectif à atteindre. Si vous souhaitez évaluer un actif sur lequel vous n’avez aucun contrôle, vous allez probablement opter pour un modèle différent de ce qui va vous servir à évaluer un actif dont la valeur dépend de vos décisions. Ainsi, si vous êtes un investisseur individuel qui cherche à évaluer une action donnée, il est probable que vous allez utiliser un modèle différent de celui utilise par un grand groupe qui envisage de racheter la société et la restructurer.
II.1.3. L’hypothèse d’efficience des marchés
L’hypothèse d’efficience des marchés consiste en la proposition suivante : Le prix actuel d’un actif reflète toutes les informations publiques sur les fondamentaux qui influent sur la valeur de l’actif.
Pour comprendre comment se fixe le cours d’une action, nous considérons l’ensemble des estimations des analystes, et nous supposons qu’en moyenne, le marché est à l’équilibre. Les estimations des analystes peuvent différer entre elles pour deux raisons :
- ils peuvent avoir accès à différents types d’informations ;
- ils peuvent analyser les informations différemment, et en déduire des cours boursiers futurs différents.
Ainsi, chaque analyste décide combien d’action acheter ou vendre au prix P(o). La somme de toutes ces transactions donne la demande totale de titres au prix P(o). Si le cours de l’action est tel qu’il y ait de demande de titres que d’offre, on va anticiper une hausse du cours, et vice versa s’il y a plus de titres offerts que de demandes effectives.
En conclusion, le prix de marché d’une action reflète la moyenne pondérée des opinions de tous les analystes.
II.2. EVALUATION DES OBLIGATIONS
Avoir une méthode d’évaluation des titres financiers est important pour au moins deux raisons :
- Premièrement, les parties qui contractent ensemble ont besoin d’avoir un modèle d’évaluation sur lequel elles soient d’accord, pour définir les termes du contrat ;
- Deuxièmement, les obligations sont souvent revendues avant leur date d’échéance. Or, comme les facteurs qui déterminent leur valeur (taux d’intérêt) changent au fil du temps, les acheteurs et les vendeurs doivent réévaluer ces obligations à chaque transaction.
II.2.1. Utilisation de l’actualisation pour évaluer les titres à revenu fixe
Il suffit d’actualiser tous les cash-flows en prenant le taux sans risque comme taux d’actualisation.
V A =
Supposons que vous achetez un titre financier qui vous verse 100 F par an sur les trois prochaines années. Combien vaut ce titre, si le taux sans risque est de 6 % par an ?
Combien vaut ce titre, si le taux sans risque est de 7 % par an ?
Toute variation des taux d’intérêt sur le marché déclenche une variation dans la direction opposée des valeurs de marché pour tous les contrats qui offrent des revenus futurs fixes.
II.2.2. Les obligations à coupon zéro
Les obligations à coupon zéro sont des titres qui ne versent qu’un seul cash-flow, à l’échéance : le remboursement de l’obligation. Il n’y a donc aucun versement de coupon (intérêt) pendant la durée de vie de l’obligation.
Le cash-flow promis par une obligation zéro coupon consiste en son remboursement, à l’échéance. Ce remboursement se fait le plus souvent à la valeur nominale (ou valeur faciale) de l’obligation.
II.2.3. Les obligations ordinaires, le rendement actuel et le rendement à l’échéance
Une entreprise qui émet une obligation ordinaire ou obligations à coupons s’engage à verser régulièrement des intérêts (coupons) au souscripteur de l’obligation (l’obligataire) pendant toute le durée de vie de l’obligation, puis à rembourser l’obligation à l’échéance. Le terme coupon vient de l’époque où les titres financiers étaient représentés par une feuille de papier timbré comportant des coupons numérotés, chaque obligataire détachant les coupons au fur et à mesure pour aller les présenter à l’émetteur en échange du paiement des intérêts.
Le taux nominal de l’obligation représente le taux d’intérêt qui s’applique à la valeur de l’obligation pour calculer le montant du coupon à verser.
Une obligation ordinaire dont le prix d’émission est égal au nominal est appelée obligation au pair.
Dans l’évaluation des obligations, on distingue deux types de rendement :
- le rendement actuel, qui consiste à rapporter le coupon annuel au cours actuel
- le rendement à l’échéance, qui est défini comme le taux d’actualisation qui égalise le cours boursier actuel et la valeur actuelle des cash-flows de l’obligation restant à payer.
Rendement à l’échéance = (Coupon + Nominal – Prix d’achat) / Prix d’achat
La valeur actuelle des obligations se détermine ainsi :
II.3. EVALUATIONS DES ACTIONS
L’évaluation des actions, titres à revenu variable, peut se faire en utilisant la méthode d’actualisation des cash-flows.
II.3.1. Caractéristiques des actions
II.3.1.1. Le cours
Théoriquement, le cours d’une action correspond à la valeur de tous les flux qu’elle est susceptible de prendre dans le futur.
Pratiquement, le cours est le résultat de la confrontation de l’offre et de la demande, à un instant donné. Il correspond au prix permettant d’échanger le plus grand nombre de titres possible.
II.3.1.2. Le PER
Le PER (Price Earning Ratio=Cours/BNPA) est un ratio utilisé pour repérer les actions surcotées et les actions sous-cotées. On peut également dire qu’il correspond au nombre de fois que le bénéfice est contenu dans le cours.
Le PER est un outil de comparaison de sociétés appartenant à un même secteur d’activité : - si PER élevé → action surcotée → vendre
- si PER faible → action sous cotée → acheter
Pour comprendre cette logique, remarquons que l’inverse du PER (BNPA/Cours) exprime le rendement de l’action
Considérons l’exemple suivant : l’action X cote 100 ; examinons les situations correspondant à trois anticipations possibles du bénéfice par action, 2, 5, 10.
II.3.1.3. La volatilité
La volatilité mesure l’amplitude des variations de cours d’une action ou d’un autre instrument financier.
La volatilité constitue une indication du risque associé au titre.
II.3.1.4. Le rendement annuel
Le rendement annuel brut s’entend avant impôt. On le calcule à l’aide du ratio suivant : Dividende/Cours.
Le rendement est calculé sur la base du dernier dividende distribué.
II.3.1.5. La liquidité
Une action est liquide lorsque le volume des transactions quotidiennes relatives à cette action est tel qu’un ordre peut être exécuté rapidement et sans modification du cours.
Un faible volume de transactions peut se traduire par des écarts de cours importants nuisibles à une bonne visibilité du marché.
II.3.2. Evaluation par les dividendes actualisés
La méthode des cash-flows actualisés consiste à calculer la valeur actuelle de tous cash-flows futurs d’une entreprise : ces cash-flows peuvent correspondre aux dividendes versés aux actionnaires, ou bien aux cash-flows dégagés par la société. Un modèle d’évaluation par les dividendes correspond à tout modèle qui évalue une action comme la somme des valeurs actuelles de ses dividendes futurs.
La valeur actuelle de l’action dans le modèle général est :
II.3.3. Evaluation par les bénéfices et les opportunités d’investissement
Une autre façon d’évaluer une action par ses cash-flows futurs consiste à anticiper les bénéfices et les opportunités d’investissement. L’avantage de se concentrer sur les bénéfices et les investissements, plutôt que sur les dividendes, est qu’ainsi, l’investisseur se focalise sur le cœur de métier de l’entreprise et sa contribution à la création de valeur. Par opposition, la politique de dividende d’une société n’est pas au cœur de la création de valeur.
En l’absence d’émission de nouvelles actions, la relation entre bénéfices et investissements est Dividende = Bénéfice – Nouveaux investissements nets
Nous pouvons en déduire une formule d’évaluation des actions :
Co = Σ ----- = Σ ------ - Σ
Où BPA représente le bénéfice par action de l’année t, et I l’investissement (par action) de l’année t.
Cette équation montre un point très important : la valeur d’une société n’est pas égale à la valeur actuelle de ses résultats futurs. A cette valeur actuelle des résultats futurs, il faut enlever la valeur actuelle de la partie des résultats réinvestis dans la société.
Pour évaluer une société en fonction de ses résultats et de ses investissements futurs, on peut dissocier la valeur de la société en deux parties :
- la valeur actuelle des résultats, le résultat de l’année étant supposé constant à l’infini ;
- la valeur actuelle des opportunités d’investissement.
On peut écrire cela de la façon suivante :
Co = BPA / k + VAN des opportunités d’investissement futures
D’autre part, la méthode d’évaluation par le PER postule que :
Co = BPA * PER
Aussi, les sociétés avec un PER élevé seront des sociétés dont l’exigence de rentabilité des actionnaires (k) est faible, soit dont les opportunités d’investissement futurs sont très intéressantes.
On appelle valeurs de croissance les actions qui ont un PER élevé parce que leurs investissements futurs devraient rapporter plus que l’exigence de rentabilité des actionnaires.
II.3.4. Est-ce que la politique de dividende affecte la richesse des actionnaires ?
La politique de dividende signifie la politique qu’une société va adopter en matière de versement d’argent à ses actionnaires, indépendamment de ses choix d’investissement et de financement.
Dans un environnement pur et parfait, où il n’y a ni impôts, ni coûts de transaction, la richesse des actionnaires ne varie pas, quelle que soit la politique de dividende adoptée par leur société.
Dans le monde réel, il existe des frictions qui font que la politique de dividende va avoir un impact sur la richesse des actionnaires. Ces frictions incluent notamment la fiscalité, l’intervention de l’Etat, les coûts de financement externes, et le coût de signalisation des dividendes.
CHAPITRE III : PRINCIPES DE GESTION DES RISQUES
Trois piliers analytiques fondent la finance en tant que discipline intellectuelle : la valeur de l’argent au fil du temps, l’évaluation des actifs, et la gestion du risque. Une des fonctions d’un système financier est de redistribuer les risques.
III.1. QU’EST-CE QUE LE RISQUE
L’incertitude est la situation où quelqu’un ne sait pas précisément ce qui va arriver. Le risque correspond à une incertitude « qui nous concerne », car elle est susceptible d’affecter notre richesse. Ainsi, l’incertitude est une condition nécessaire, mais pas suffisante, pour qu’il y ait un risque : on peut avoir de l’incertitude sans avoir de risque, alors que toute situation risquée comporte automatiquement de l’incertitude.
Dans la plupart des situations risquées, on peut quantifier ce qui est susceptible d’arriver en termes de gains ou de pertes. Vous décidez par exemple en Bourse. Si la valeur de votre portefeuille baisse, vous allez quantifier la perte subie, de même, si votre portefeuille progresse, vous allez pouvoir quantifier le gain obtenu.
En général ; les gens ne prennent en considération que le côté négatif (la possibilité de faire des pertes) comme mesure du risque, et pas du tout le côté positif (la probabilité d’avoir des gains).
L’aversion au risque caractérise l’attitude d’une personne dans une situation de prise de risque. Cette aversion au risque se mesure comme la propension qu’un individu aura à payer pour réduire son exposition à un risque donné. Ainsi, quand on évalue les gains et les coûts d’une réduction du risque, les individus qui ont une aversion au risque vont prendre, à coût égal, l’alternative qui présente le moins de risque. Par exemple, si vous êtes prêt à accepter un taux de rentabilité inférieur sur un investissement, parce que ce taux de rentabilité vous est garanti de manière plus sûre, alors vous avez une aversion au risque.
III.1.1. Analyse des différents risques
Le risque d’un titre peut avoir différentes origines qui constituent autant de types de risques : - les risques industriels, commerciaux, sociaux,…. : manque de compétitivité, arrivée de nouveaux concurrents, inadaptation du réseau commercial ;
- le risque de liquidité : risque de ne pouvoir vendre à son prix un titre ;
- le risque de change : la variation du taux de change peut entraîner une perte ou un gain de change ;
- le risque de taux d’intérêt : les fluctuations des taux d’intérêt exposent le détenteur de titres financiers au risque de moins value en capital ;
- le risque politique : risque lié à une situation politique ou une décision du pouvoir politique : nationalisation sans indemnité suffisante, révolution,..
- le risque réglementaire : le changement de loi ou de réglementation peut influer directement sur la rentabilité d’un secteur ;
- le risque d’inflation : risque d’être remboursé dans une monnaie dépréciée, d’obtenir un taux de rentabilité inférieure au taux d’inflation ;
- le risque d’escroquerie ;
- les risques naturels : tempête, tremblement de terre, cyclone, rez de marée ;
- le risque conjoncturel : enthousiasme ou déprime en bourse.
Dire qu’il n’y a pas de risque, c’est faire preuve soit d’une confiance excessive en soi, soit d’une incapacité à penser l’avenir… deux défauts très grave pour un financier. Il va de soit que toute étude financière sérieuse commence par une analyse fine des différents risques.
III.1.2.La gestion du risque
La gestion du risque est la démarche qui consiste à évaluer les gains et coûts d’une réduction du risque, et à décider finalement dans quel sens on agit (la décision pouvant aussi être de ne pas agir).
De temps en temps, certaines personnes regrettent d’avoir pris des mesures coûteuses pour réduire leur risque, alors que finalement ce qu’elles craignaient n’est pas arrivé. Si vous vendez une action juste avant que son cours boursier soit multiplié par trois, vous allez sûrement regretter votre décision. Il faut toutefois rappeler que toutes décisions prises en situation d’incertitude sont prises avant que l’incertitude soit levée. Ce qui est important, c’est que votre décision soit la meilleure possible compte tenu de l’information dont vous disposez au moment où vous avez pris la décision. Alors que l’on peut se targuer d’avoir une connaissance parfaite du passé, personne ne peut clamer qu’il a une connaissance précise du futur.
La pertinence d’une décision de gestion du risque doit être jugée en fonction de l’information qui était disponible au moment où la décision a été prise.
III.1.3.L’exposition au risque
Si vous êtes exposé à un certain type de risque, à cause de votre métier, ou du secteur de votre entreprise, ou de vos habitudes de consommation, on dit que vous avez une exposition au risque particulière. Par exemple, si vous avez un contrat de travail à durée déterminée (CDD), votre risque de ne pas rester dans l’entreprise est relativement élevé. Si vous êtes professeur dans une université, votre risque de licenciement est relativement faible.
Le risque d’un actif ou d’une transaction ne peut pas être évalué dans l’absolu. Dans un contexte donné, le fait d’acheter ou vendre un actif va augmenter votre exposition au risque ; dans une autre situation, il se peut que la même transaction réduise votre risque.
On appelle spéculateurs les investisseurs qui spéculent, c’est-à-dire qui réalisent des opérations qui augmentent leur exposition au risque dans le but d’augmenter leur richesse.
III.2. RISQUE ET DECISIONS ECONOMIQUES
Certaines décisions financières ne sont prises que pour gérer un risque : par exemple, la décision de s’assurer contre certains risques anticipés. Mais la plupart des décisions financières ne sont pas prises uniquement pour gérer un risque. Toutefois, ces décisions sont influencées par la présence de risques et en conséquence, sont aussi, pour partie, des décisions de gestion du risque.
III.2.1 Les risques supportés par les ménages
Il existe plusieurs manières de classer les risques. Les risques pour les ménages sont :
- Risque de maladie, d’invalidité, de décès ;
- Risque de chômage ;
- Risque de disparition des actifs durables
- Risque de dettes ;
- Risque sur actifs financiers.
Ces risques supportés par les ménages ont une influence sur quasiment toutes leurs décisions économiques.
III.2.2. Les risques supportés par les entreprises
Les entreprises sont des organisations dont la fonction économique première est de produire des biens et des services. A peu près toutes les activités d’une entreprise impliquent une exposition au risque. La prise de risque est l’une des actions les plus essentielles et inséparables de la gestion d’entreprise.
Les risques de l’entreprise sont supportés par ses partenaires économiques et financiers : les actionnaires, les banquiers, les clients et fournisseurs, les salariés, l’Etat. Le système financier peut servir à transférer les risques de l’entreprise sur ses partenaires. Des institutions financières, comme par exemple les compagnies d’assurances, ont pour métier de regrouper et de transférer les risques. Au final, cependant, tous les risques des entreprises sont supportés par les ménages et les individus.
Tableau 2 : Partenaires de l’entreprise, apports et risques
Le risque de faillite concerne tous les partenaires de l’entreprise et bien sûr l’entreprise elle-même. Le risque croît avec le montant et la durée de l’apport.
III.2.3. Le rôle de l’Etat dans la gestion des risques
Les Etats et les organismes gouvernementaux à tous les niveaux jouent un rôle important dans la gestion des risques, soit par la prévention, soit par la redistribution des risques. L’Etat intervient souvent pour protéger et indemniser, dans le cas de catastrophes naturelles ou d’origines humaines (guerres, pollution). Par ailleurs, un des arguments majeurs pour que le gouvernement joue un rôle dans le développement économique, est que dans le cas d’un investissement dans des infrastructures, le risque de l’investissement peut être réparti sur tous les contribuables.
III.3. LE PROCESSUS DE GESTION DU RISQUE
Le processus de gestion du risque correspond à un système d’analyse et de traitement du risque. Ce processus peut-être décomposé en cinq étapes : identification du risque, évaluation du risque, sélection des techniques de gestion du risque, mise en œuvre et contrôle.
III.3.1. Identification du risque
L’identification du risque consiste à déterminer quelles sont les plus grandes expositions au risque pour l’élément considéré, que ce soit une maison, une entreprise ou un autre élément. Certains ménages, ou des entreprises, ne sont pas toujours conscients de risques auxquels ils sont exposés.
Pour bien identifier les risques, il faut considérer l ‘actif à analyser dans sa totalité, et recenser la totalité des incertitudes qui affectent cet actif.
Le principe selon lequel il faut prendre l’actif à analyser dans sa totalité s’applique aussi aux entreprises. Par exemple, regardons le risque de change d’une société qui achète ses matières premières à l’étranger, et vend ses produits à l’étranger, le tout en devises. Cela n’aura pas grand sens si les dirigeants de l’entreprise ne mesurent leur risque de change que sur les dépenses, ou que sur les ventes. Ce qui importe aux partenaires de l’entreprise, c’est de connaître l’effet global de la variation des cours de change sur la différence entre les revenus et les coûts.
Pour bien recenser toutes les expositions au risque, c’est une bonne idée d’avoir une liste qui énumère tous les risques potentiels et comment ces risques sont reliés entre eux. Dans le cas d’une société, cela nécessitera souvent de collecter beaucoup d’informations détaillées sur l’économie du secteur dans lequel la société travaille, la technologie de la société et ses sources de matières premières et fournitures.
III.3.2. Evaluation du risque
L’évaluation du risque consiste à quantifier les coûts associés aux risques qui ont été identifiés lors de la première étape.
Les compagnies d’assurance emploient des actuaires, qui sont des professionnels spécialisés en mathématiques et en statistiques, dont le rôle est de collecter des données, de faire des analyses statistiques, et d’en déduire les probabilités de maladie, d’accident, et autres risques analogues.
Les ménages et les entreprises ont souvent besoin de l’avis d’experts pour évaluer leur exposition à certains risques, et mesurer les coûts et les bénéfices de stratégies d’investissement dans des actions, des obligations, etc.
III.3.3. Sélection des techniques de gestion du risque
Il y a quatre techniques fondamentales pour réduire le risque : éviter le risque, prévenir le risque, absorber le risque et transférer le risque.
III.3.4. Mise en œuvre
Une fois que l’on a décidé des techniques à adopter, il s ‘agit de les mettre en œuvre. Le principe sous-jacent de cette étape du processus est qu’il faut minimiser les coûts de mise en œuvre de la solution.
III.3.5. Contrôle
La gestion du risque demande un suivi régulier pour s’assurer que les décisions passées sont toujours optimales. Au fil du temps, et en fonction des circonstances, de nouvelles expositions au risque peuvent apparaître, les informations sur les probabilités et l’importance des risques peuvent s’affiner ou devenir accessibles plus facilement, enfin les techniques de gestion du risque peuvent devenir meilleur marché.
III.4. LES TROIS DIMENSIONS DU TRANSFERT DE RISQUE
Parmi les techniques de gestion du risque, le transfert de tout ou partie du risque sur d’autres personnes est la technique où le marché financier joue le plus grand rôle. La méthode la plus simple de transférer un risque consiste simplement à vendre l’actif qui est la source du risque. Par exemple, le propriétaire d’une maison est exposé à au moins trois risques : l’incendie, les tempêtes, et le risque de baisse de la valeur de marché de la maison. En cédant sa maison, le propriétaire n’est plus exposé à aucun de ces trois risques.
On distingue trois méthodes de transfert du risque et que l’on appelle les trois dimensions de transfert du risque :
- la couverture : on dit que quelqu’un se couvre contre un risque quand la démarche de réduire son exposition à une perte implique simultanément pour l’individu de renoncer à un gain ;
- l’assurance : s’assurer signifie payer une prime (le prix du contrat d’assurance) pour éviter des pertes futures. En souscrivant un contrat d’assurance, vous remplacez une probabilité de perte importante par une certitude de perte plus faible ;
- la diversification : se diversifier signifie détenir des montants équivalents de plusieurs actifs risqués plutôt que de tout investir dans un seul actif. La diversification limite ainsi votre exposition au risque par rapport au risque d’un actif sans risque.
III.5. TRANSFERT DE RISQUE ET EFFICIENCE ECONOMIQUE
Les mécanismes institutionnels qui aident au transfert de risque contribuent de deux manières fondamentales à l’efficience économique. D’abord, ces mécanismes permettent la réallocation des risques vers les personnes qui sont les plus prêtes à les assumer ; ensuite, ils favorisent une réallocation des ressources et de la consommation qui tient compte de la nouvelle distribution des risques. Par exemple, en réduisant les risques issus de la création d’entreprises, ces institutions peuvent dynamiser l’esprit d’entreprise, ce qui aura des effets bénéfiques sur la société en général.
III.6. LA THEORIE DU PORTEFEUILLE
La théorie du portefeuille peut se définir comme l’approche quantitative qui vise à optimiser la gestion du risque. Quelle que soit l’unité analysée (un ménage, une entreprise, ou toute organisation), l’application de la théorie du portefeuille consiste à identifier et évaluer les arbitrages entre les gains et les coûts d’une réduction du risque, et à choisir la démarche optimale.
Il existe des circonstances dans lesquelles deux parties réalisent un transfert de risque par un contrat, et contribuent ainsi à réduire leurs risques respectifs sans aucun coût, sinon celui de rédiger le contrat. Par exemple, le vendeur et l’acheteur d’une maison peuvent tomber d’accord dès maintenant sur le prix de vente, même si le transfert de propriété n’aura lieu que dans trois mois. Un tel contrat est un exemple de contrat à terme. En acceptant ce contrat à terme, les deux parties éliminent l’incertitude associée à la volatilité des prix du marché de l’immobilier sur les trois prochains mois.
Les décisions de gestion du risque où les parties ne supportent aucun coût sont plutôt l’exception que la norme. En règle générale, il y a une analyse comparative des gains par rapport aux coûts d’une réduction des risques. Cette analyse comparative est particulièrement observable dans les décisions des ménages sur l’allocation de leur richesse entre les différents actifs (actions, obligations, immobilier, etc.).
Les premiers modèles formels dans la théorie du portefeuille ont été conçus justement pour traiter de ces décisions. Ces modèles utilisent des distributions de probabilités pour quantifier le rapport entre le risque et la rentabilité espérée. Pour un actif donné dans le portefeuille, la rentabilité attendue correspond à la moyenne de la distribution, et le risque à l’écart type de la distribution.
III.7. LES DISTRIBUTIONS DE PROBABILITE DES RENTABILITES
Une mesure couramment utilisée pour le risque d’une action est la volatilité. La volatilité dépend de tous les taux de rentabilités possibles pour une action et du taux d’occurrence. La volatilité d’une action sera d’autant plus grande qu’il y a une grande étendue des rentabilités possibles, et que les rentabilités extrêmes ont une forte probabilité d’occurrence.
Le taux de rentabilité espéré correspond à la moyenne des valeurs possibles, c’est-à-dire la somme de leurs valeurs pondérées par leur probabilité d’occurrence.
Rentabilité espérée = Somme de (probabilité de rentabilité * Rentabilité possible)
E (x) =
III.8. L’ECART TYPE COMME MESURE DU RISQUE
On a montré que la volatilité d’un titre dépend de l’amplitude des résultats possibles et des probabilités que les valeurs extrêmes se produisent. En finance, la mesure qui est utilisée le plus couramment pour mesurer la volatilité d’une distribution de probabilité est l’écart type (son symbole σ se prononce «sigma»), qui est calculé comme suit :
Ecart type (σ ) = Racine carré de la somme de (probabilité) * (Rentabilité possible – rentabilité espérée)²
III.9. RISQUE DE MARCHE ET RISQUE SPECIFIQUE
Le risque en finance correspond aux fluctuations de la valeur ou ce qui revient au même, aux fluctuations du taux de rentabilité.
L’analyse des fluctuations de la valeur d’un titre montre que celles-ci peuvent s’expliquer soit :
- par la fluctuation de l’ensemble du marché : le marché progresse à la suite de l’annonce d’une baisse des taux d’intérêt, d’une croissance de l’économie plus forte que prévue ;
- par des facteurs propres au titre qui n’affectent pas le marché dans son ensemble : la signature d’une importante commande, la faillite d’un concurrent, une nouvelle réglementation pesant sur les produits,…
Ces deux sources de fluctuations donnent naissance à deux types de risque : le risque de marché et le risque spécifique.
Le risque de marché ou risque systématique, est dû à l’évolution de l’ensemble de l’économie, de la fiscalité, des taux d’intérêt, de l’inflation. C’est le risque du titre corrélé à celui du marché. Ce risque affecte plus ou moins tous les titres.
Le risque spécifique ou risque intrinsèque ou risque idiosyncrasique est indépendant des phénomènes affectant l’ensemble des titres. Il résulte uniquement d’éléments particuliers qui affectent tel ou tel titre : c’est la mauvaise gestion de l’entreprise, l’incendie qui détruit son usine ou l’invention technologique qui rend obsolète sa principale gamme des produits.
Le risque de marché et le risque spécifique étant totalement indépendants, leurs mesures sont indépendants, ce qui permet de leur appliquer le théorème de Pythagore
(Risque totale)² = (Risque de marché)² + (Risque spécifique)²
CHAPITRE IV : LE CHOIX D’UN PORTEFEUILLE
Le portefeuille d’un individu donné inclut ses actifs (actions, obligations, part sociales, maisons ou appartements, rentes, contrat d’assurance, etc.) et toutes ses dettes (emprunts étudiants, immobiliers, crédits à la consommation, etc.).
Il n’y a pas une stratégie unique de choix de portefeuille qui convienne à tout le monde. Il y a en revanche quelques principes, comme par exemple le principe de diversification, qui s’appliquent à tous les individus ayant une aversion au risque. Dans ce chapitre, nous développons cette notion et analysons l’arbitrage entre le risque et la rentabilité.
IV .1. LA DEMARCHE DE CONSTITUTION D’UN PORTEFEUILLE
Le choix de portefeuille correspond à l’étude de l’allocation optimale de la richesse d’un individu. C’est une démarche consistant à équilibrer les risques et les rentabilités espérées, pour aboutir au meilleur portefeuille possible d’actifs et de passifs. Une définition étroite du choix de portefeuille ne traite que des décisions d’investissement en actions, obligations et autres titres financiers. Une définition plus large inclut les arbitrages entre acheter ou louer sa maison, les types d’assurance et les montants pour lesquels souscrire, ou encore la gestion de son endettement personnel. En prenant une définition encore plus large, on peut y inclure les décisions d’investissement en capital humain (par exemple les décisions de poursuivre ses études). Le point commun à toutes ces définitions est qu’il existe un arbitrage à faire entre les risques supportés et les rentabilités espérées. On parle de couple risque-rentabilité.
Pour bâtir votre portefeuille, vous devez commencer par déterminer quels sont vos objectifs et l’horizon que vous vous fixez pour y parvenir. L’horizon de planification représente l’horizon maximum sur lequel vous planifiez. L’horizon de décision correspond à l’intervalle de temps entre deux décisions de révision du portefeuille. La durée de cet intervalle est fonction du choix de l’individu, avec certaines limites. L’horizon de décision le plus court correspond à l’horizon de transaction, c’est-à-dire l’intervalle de temps minimum pour changer la structure de son portefeuille.
IV.2. LA CONSTRUCTION DE PORTEFEUILES
La gestion de portefeuille consiste à créer, puis à entretenir, un portefeuille d’actifs financiers en fonction d’un certain nombre d’objectifs et de contraintes. C’est un processus dynamique et non statique. Le portefeuille initial doit être, en permanence révisé (en langage financier, on dit « rebalancé ») afin de garder le cap des objectifs fixés.
IV.2.1. Le processus de construction d’un portefeuille
La première étape consiste, pour le gestionnaire, à définir sa politique d’investissement, en fixant clairement les objectifs de rentabilité recherché et de risque toléré par l’investisseur. Nous retrouvons là les deux dimensions fondamentales de la gestion du portefeuille. Ces deux dimensions sont ; évidemment, interdépendantes : un placement peu risqué et très rentable n’existe pas ! Cette politique d’investissement doit également tenir compte de contraintes, qui peuvent être propres à l’investisseur (horizon de placement, niveau de liquidité, refus de certains secteurs économiques…) ou externes ( légales, fiscales..). Cette stratégie peut être active ou passive.
Les stratégies passives se fondent principalement sur la réplication d’un indice. Le portefeuille est alors composé des mêmes titres que l’indice répliqué, dans les mêmes proportions. Une stratégie active consiste à modifier la composition du portefeuille en fonction des révisions des prévisions de marché que ces prévisions portent sur le marché dans sa globalité (inflation, croissance du PIB,..) ou sur un titre en particulier (chiffre d’affaires, marges,..). Le gestionnaire cherche alors à dégager une rentabilité ajusté (du risque) en excès. Enfin, certaines stratégies peuvent être intermédiaires, proches d’un indice mais à la recherche d’un alpha positif.
Sur la base de ces différents éléments, le gestionnaire élabore une allocation stratégique d’actifs : quelles classes d’actifs, dans quelles proportions, quels pays, quels secteurs,.. Pour sa mise en œuvre, des outils quantitatifs sont utilisés pour optimiser le couple rentabilité-risque du portefeuille.
Une fois exécutée, la pertinence de l’allocation stratégique est, à intervalles réguliers, contrôlée et éventuellement révisée.
IV.2.2. La prise en compte de l’horizon de placement
Selon que le placement est à court, moyen ou long terme, la classe d’actifs dans laquelle seront investies les liquidités sera plus ou moins risquée. Plus l’investissement est à court terme, plus les actifs devront être risqués car, en cas de pertes, il sera plus difficile de se « refaire ». L’horizon a également une incidence sur la liquidité des actifs retenus. Un investissement à court terme doit ainsi nécessairement se faire dans une classe d’actifs très liquides.
IV.2.3. Le choix de la classe d’actifs et l’allocation stratégique
Le choix de la classe d’actifs est fonction du niveau de risque qu’est prêt à prendre l’investisseur. Toutes les banques doivent désormais établir le profil de risque de leur client, à partir de questionnaires. On parle alors de profilage.
Tableau 3 : Aversion au risque et classe d’investissement
IV.2.4. La sélection des actions à mettre en portefeuille
Une fois la ou les classes d’actifs définies ainsi que leur poids respectif, le gestionnaire doit, s’il pratique une gestion active, sélectionner les titres à mettre en portefeuille. Cette sélection peut se faire de différentes façons. La gestion traditionnelle va consister à sélectionner les titres qui semblent sous-évalués par le marché (gestion dite value) ou ceux dont les perspectives de croissance semblent les plus prometteuses (gestion dite growth). La gestion quantitative de portefeuille va, quant à elle, se fonder sur des modèles statistiques pour identifier les titres dans lesquels investir. La gestion traditionnelle suppose que le gestionnaire connaisse son univers d’investissement (les actions camerounaises, par exemple), ce qui lui limite les possibilités de diversification internationale. Au contraire, le gestionnaire quantitatif fait confiance à son modèle, ce qui peut le conduire à investir dans des titres dont il ignore tout. L’univers d’investissement peut alors être mondial.
Dans une gestion dite value, le gestionnaire va rechercher des titres dont le cours lui paraît être significativement inférieur à leur valeur fondamentale. Quand à cette valeur fondamentale, elle sera estimée par l’actualisation des flux de trésorerie disponibles ou le recours à des approches comparatives. Il parie donc sur une inefficience temporaire du marché, le cours du titre ne reflétant pas sa valeur. L’identification des titres sous-évalués ou à forte croissance se fait par le biais d’analyses financières. Les analystes qui réalisent des études pour le compte des gérants de leur société ou de fonds d’investissement sont qualifiés de sell side. Ceux qui utilisent leurs propres analyses ou celles des autres pour faire des recommandations ou construire des portefeuilles sont qualifiés de buy side. La plupart des analystes sell side sont spécialisés par secteur d’activité et zone géographique.
Les approches top-down partent d’une analyse de l’économie pour définir les secteurs d’activité dans lesquels investir. Au contraire, les approches bottom-up vont passer en revue (screening) tous les titres d’un marché afin de rechercher ceux dans lesquels investir, sans considération particulière d’équilibre entre secteurs d’activité.
IV.2.5. Le poids à attribuer à chaque ligne de titres
Une fois les titres à entrer en portefeuille sélectionnés, se pose la question du poids à leur accorder au sein de ce dernier. C’est à ce stade que la notion de corrélation entre titres intervient. Le niveau de la diversification dépendra de la plus ou moins grande corrélation entre les titres.
Pour illustrer notre propos, voyons le cas d’un portefeuille composé de deux titres
- Cas où la corrélation est parfaitement positive : le risque du portefeuille correspond à la moyenne pondérée des risques des deux titres qui le composent, la diversification ne permet pas de réduire le risque ;
- Cas où la corrélation est parfaitement négative : dans cette situation, il est possible de composer un portefeuille pour lequel le risque est nul ;
- Cas général où la corrélation comprise entre –1 et 1 : La diversification permet de réduire le risque. Le risque du portefeuille est inférieur à la moyenne pondérée des risques des titres qui le composent. Plus le coefficient de corrélation se rapproche de –1, plus le risque du portefeuille diminue.
IV.3. L’ARBITRAGE ENTRE RENTABILITE ESPEREE ET RISQUE
L’objectif pour un gestionnaire de portefeuille est, pour un niveau de risque souhaité par les clients, de trouver le portefeuille qui rapporte le taux de rentabilité anticipé le plus élevé possible, méthode nommée optimisation de portefeuille. A partir de maintenant, nous parlerons d’actifs risqués sans pour autant détailler si ce sont des actions, des obligations, des options, des contrats d’assurance, etc. Le risque perçu sur un actif dépend essentiellement de l’environnement et du caractère de l’investisseur.
L’optimisation de portefeuille est souvent faite en deux étapes :
- trouver la combinaison optimale d’actifs et ;
- ajouter à ce portefeuille optimal risqué une certaine proportion d’actifs sans risque.
IV.3.1. Qu’est-ce qu’un actif sans risque ?
Dans la théorie du portefeuille, l’actif sans risque est défini comme un titre qui offre un taux de rentabilité parfaitement certain, compte tenu de l’unité de compte choisie et de la longueur de l’horizon de décision de l’investissement. Quand l’investisseur n’est pas identifié, l’actif sans risque représente un titre offrant un taux de rentabilité parfaitement certain sur l’horizon de transaction (c’est-à-dire l’horizon de décision le plus court possible).
IV.3.2. La combinaison d’un actif risqué et d’un actif sans risque
Vous disposez de 100 000 FCFA. Vous hésitez entre un actif sans risque qui rapporte du 0,06 par an et un actif risqué dont l’espérance de rentabilité est de 0,14 et dont l’écart type est de 0,20. Quelle proportion de vos 100 000 FCFA devriez-vous investir dans l’actif risqué ?
Le portefeuille H est investi pour moitié en actif sans risque et pour moitié en actif risqué.
Voyons maintenant comment nous pouvons obtenir le portefeuille correspondant à n’importe quel point de la droite. Cherchons par exemple le portefeuille qui offre une rentabilité espérée de 0,09 :
- Relier la rentabilité espérée du portefeuille à la proportion investie dans l’actif risqué
Appelons α la proportion investie dans l’actif risqué. La rentabilité espérée sur un portefeuille, quel qu’il soit, est égale à : E ( r ) = α E (rs) + (1-α) rF → = rF + α [E (rs) - rF ]
En remplaçant les termes par leur valeur , on obtient E(r ) = 0,06 + 0,08 α
C’est-à-dire 0,09 = 0,06 + 0,08 α α = 0,375
Ainsi, la répartition de ce portefeuille est de 37,5 % en actif risqué et 62,5 % en actif sans risque.
- Relier l’écart type du portefeuille à la proportion investie dans l’actif risqué
Quand nous combinons un actif risqué et un actif sans risque dans un portefeuille, l’écart type total est égal à la moyenne des écart types des actifs pondérés par leur poids dans le portefeuille. C’est-à-dire σ = σS α + 0* (1-α) = 0,20α
Pour trouver l’écart type correspondant à une rentabilité espérée de 0,09, nous remplaçons α par 0,375 dans cette équation et nous obtenons σ : σ = σs α = 0,20 * 0,375 = 0,075. Ainsi, l’écart type de ce portefeuille est de 0,075 (ou 7,5 %)
IV.3.3. Comment obtenir une rentabilité
Cherchons le portefeuille qui corresponde à une rentabilité espérée de 0,11 par an. Quel est son écart type ?
0,11 = 0,06 + 0,08 α
α = (0,11- 0,06) / 0,08 = 0,625
Ainsi, la composition du portefeuille est de 62,5 % d’actif risqué pour 37,5 % d’actif sans risque.
Pour trouver l’écart type correspondant, nous résolvons l’équation
= 0,20 * 0,625 = 0,125
Ainsi, l’écart type de ce portefeuille est de 0,125 ou 12,5 %.
IV.3.4. Le portefeuille efficient
Un portefeuille efficient est défini comme le portefeuille qui offre la meilleure rentabilité possible, pour un niveau de risque spécifié.
Pour expliquer la signification du concept de portefeuille efficient et la manière d’en bâtir un, nous allons ajouter un deuxième actif risqué à notre exemple précédent. L’actif risqué 2 offre une espérance de rentabilité de 0,08 par an avec un écart type de 0,15 : il est représenté par le point R.
IV.4. LE RISQUE D’UN PORTEFEUILLE
Un titre se caractérise par deux paramètres : le risque (σ ) et la rentabilité (E(x)). Mais un investisseur financier a généralement plusieurs titres (ou portefeuille) ; il devient important de comparer les titres entre eux.
Considérons à titre d’exemple les actions A et B dont les caractéristiques financières sont les suivantes :
Ce tableau fait clairement apparaître que l’action B présente la rentabilité la plus forte et le risque le plus élevé tandis que l’action A se caractérise par une rentabilité plus faible pour un risque plus faible.
Il est donc clair que ces deux placements ne peuvent être comparés directement. En effet, choisir A revient à jouer la sécurité tandis que le choix de B revient à jouer le risque pour une rentabilité supérieure.
Aucun raisonnement simple ne permet de choisir directement entre A et B. Dès lors, on peut aborder le problème sous un angle différent : une combinaison des actions A et B serait-elle préférable à l’achat exclusif de l’un ou de l’autre titre ?
Dans l’hypothèse, le portefeuille de notre investisseur est composé d’action A (XA) et d’action B (XB) et donc une espérance de rentabilité égale à la moyenne pondérée des espérances de rentabilité de chacun des titres qui le composent.
On a donc : E (rA,B) = XA * E (rA) + XB * E (rB) XA + XB = 1
Bien que les titre A et B aient des fluctuations positivement corrélés entre elles, le choix d’un portefeuille a permis, pour un niveau de rentabilité donné, de réduire le risque.
La diversification permet :
- soit de réduire le risque pour un niveau de rentabilité donné ;
- soit d’améliorer la rentabilité pour un niveau de risque donné.
On doit envisager deux hypothèses dans l’évaluation du risque du portefeuille :
- les rentabilités des titres sont indépendantes. On a alors
V(RP) = P²1 V(R1) + P²2 V (R2)
- les rentabilités des titres ne sont pas indépendantes. On alors
V(RP) = P²1 V(R1) + P²2 V(R2) + 2 P1P2 COV(R1,R2)
Exemple: On donne
E(r1) = 0,08 σR1 = 0,17 P1 = 0,6 COV (R1,R2) = - 0,02
E(r2) = 0,11 σR2 = 0,32 P2 = 0,4
Question
Calculez la rentabilité espérée et le risque du portefeuille dans les deux hypothèses
CHAPITRE V : LE MODELE D’EVALUATION DES ACTIFS FINANCIERS
Le modèle d’évaluation des actifs financiers (MEDAF, en anglais Capital Asset Pricing Model, ou CAPM) correspond à une explication des prix d’équilibre sur les marchés d’actifs risqués. Il se fonde sur les théories du portefeuille et en déduit des relations numériques entre les taux de rentabilité des actifs risqués, en posant l’hypothèse que les prix des actifs s’ajustent pour que l’offre égale la demande (prix à l’équilibre).
Le MEDAF est important pour deux raisons. Premièrement, il fournit une explication théorique au fait que beaucoup de personnes pratiquent de l’investissement passif, sous la forme de portefeuilles indexés. Ces portefeuilles sont des portefeuilles diversifiés où les actifs sont détenus dans la même proportion que dans des indices de marchés, comme le CAC 40, l’Euro Stoxx 50,…
Deuxièmement, le MEDAF permet d’estimer des taux d’actualisation qui peuvent servir à quantité d’applications en finance. Par exemple, pour évaluer des actions, il faut actualiser les cash flows futurs à un taux ajusté au risque. Les décideurs utilisent ce type de modèle pour procéder à leurs choix d’investissement.
V.1. LES HYPOTHESES DE BASE DU MEDAF
Le Médaf repose sur les hypothèses simplificatrices suivantes :
- Les investisseurs ont de l’aversion pour le risque et cherchent à maximiser leur utilité espérée ;
- Les décisions sont prises sur la base de l’étude de la rentabilité espérée et de l’écart type des rentabilités ;
- L’horizon est réduit à une seule période ;
- Les investisseurs ont tous les mêmes anticipations concernant la rentabilité et le risque des titres de marché ;
- Les investisseurs peuvent emprunter ou prêter à un taux sans risque. Ils peuvent également vendre leurs titres ;
- Les marchés de capitaux sont parfaits : il n’y a pas de frais de transaction, pas d’impôt et l’information est accessible à tous.
V.2. L’EVALUATION DU MEDAF
Ce modèle explique comment se réalise l’équilibre entre offre et demande pour chaque titre, conduisant à l’équilibre général du marché. En outre, il permet de déterminer le rendement requis d’un actif risqué en fonction de son risque systématique.
Nous faisons un exposé du modèle à travers quatre points.
V.2.1. Notion de frontière efficiente
Chaque titre pouvant être mis en portefeuille est caractérisé par son espérance de rentabilité E (Rp) et par son niveau de risque σ RP .
Si l’on représente sur un graphique les points, obtenus à partir des deux caractéristiques, correspondent à l’infinité des portefeuilles ainsi constitué, on obtient une surface.
Parmi plusieurs portefeuilles présentant un même niveau de risque, l’investisseur retiendra celui dont l’espérance de rendement est la plus élevée.
On peut dire aussi que, pour un niveau de rentabilité souhaité, il choisira le portefeuille le moins risqué.
Ces portefeuilles qui pour un niveau de risque donné, laissent espérer la rentabilité la plus élevée, sont appelés : portefeuilles efficients ou optimaux. Ils constituent la partie EF de la courbe ( C ) qualifiée de frontière efficiente.
Parmi tous les portefeuilles figurant sur la frontière efficiente, l’investisseur choisira celui qui convient le mieux en fonction de son attitude face au risque.
V.2.2. Le modèle d’équilibre
L’investisseur peut aussi acquérir un actif sans risque (bon du trésor, emprunt d’Etat,..) de rentabilité certaine (RF) et constituer ainsi un portefeuille mixte comprenant l’actif sans risque et des actifs risqués.
Il existe quatre situations possibles :
- l’investisseur place tout son capital dans l’actif sans risque (point RF) ;
- l’investisseur place son capital dans le portefeuille de marché (point M) ;
- l’investisseur répartit son capital entre actif sans risque et portefeuille de marché (point A) ;
- l’investisseur emprunte au taux sans risque et place son capital et l’emprunt dans le portefeuille de marché (point B).
Les portefeuilles constitués à partir d’un portefeuille quelconque N et de l’actif sans risque sont situés sur la droite RF N. Ceux composés à partir du portefeuille M et de l’actif sans risque sont sur la droite RF M, tangente à la frontière efficiente.
Le graphique montre que les portefeuilles situés sur la droite RF M sont efficients (ils surclassent tous les autres). La droite RF M est donc la nouvelle frontière efficiente, dans l’hypothèse de portefeuilles mixtes.
Dès lors, tous les investisseurs vont se constituer des portefeuilles incluant l’actif sans risque et le portefeuille M. Ce portefeuille M est le portefeuille de marché (c’est-à-dire un portefeuille comprenant tous les titres cotés dans les proportions de leur capitalisation boursière). En effet, chaque investisseur voulant détenir le portefeuille M procédera aux transactions appropriées. Ces transactions ne prendront fin que lorsque tous les investisseurs auront des portefeuilles identiques, c’est-à-dire des portefeuilles comprenant tous les titres cotés dans les proportions de leur capitalisation boursière. Ainsi se réalise l’équilibre entre l’offre et la demande de chaque titre et l’équilibre générale du marché.
On notera qu’une fois obtenue la nouvelle frontière efficiente (droite RF M), le choix d’un portefeuille sur cette droite n’est pas fonction de la structure du portefeuille d’actions, seuls importent les proportions entre actif sans risque et portefeuille M (quand la proportion du portefeuille M croit, le rendement espéré croit,… ainsi que le niveau de risque).
V.2.3. Le prix du risque
Un portefeuille P comprenant une proportion α du portefeuille M (dont la rentabilité espérée est E(RM) et dont le risque est σRM ) et une proportion (1-α) de l’actif sans risque, se caractérise par :
- une espérance de rentabilité E(RP) = (1-α) RF + α E(RM)
= RF + α [E(RM) –RF]
- un risque : σRP = α σRM → α = σRP / σRM (Rappel σRF = 0)
Le portefeuille M est, par définition, parfaitement diversifié, il ne comporte donc pas de risque spécifique (σε = 0). Il en est de même du portefeuille P qui est constitué du portefeuille M et de l’actif sans risque. La relation : σ²RP = β² σRM + σ²ε devient alors
σRP = β σRM. Dès lors : α = σRP / σRM = βσRM / σRM = β. D’où E (RP) = RF + βP [E(RM) –RF] (1)
La quantité [E(RM) –RF] représente le prix du risque, on l’appelle aussi prime de risque du marché.
βP représente le risque systématique du portefeuille P et donc, seul ce risque est rémunéré. Le risque spécifique n’est pas rémunéré puisqu’il a pu être éliminé par diversification.
E(RP) est la rentabilité requise (espérée) par les opérateurs qui investissent dans le portefeuille P.
V.2.4. La droite de marché
La relation (1) ci-dessus montre que la rentabilité espérée d’un investissement est une fonction linéaire du β de cet investissement. La droite représentative de cette relation est appelée droite de marché ou droite des actifs risquées.
D’après la relation (1) : si β = 0 → E(RP) = RF
si β = 1 → E(RP) = E(RM)
Le modèle de la droite de marché est extrêmement riche. Il permet bien sûr de déterminer le taux de rentabilité exigé d’un titre compte tenu du seul risque qui est rémunéré c’est-à-dire le risque de marché.
Les déplacements de la droite elle-même caractérisent la nature des évolutions du marché et en facilitant la compréhension :
- un déplacement parallèle, sans variation de la pente (prime de risque), traduit une évolution du marché en fonction des taux d’intérêt. Une baisse des taux doit entraîner le glissement de la droite vers le bas, donc une appréciation générale de toutes les actions ;
- un déplacement non parallèle (ou pivotement de la droite) traduit une variation du montant de la prime de risque, donc de la rémunération du risque. Dans ce cas, les titres les plus risqués subissent les évolutions les plus sensibles alors que les actions les moins risquées peuvent ne pas être significativement affectées.
Par ailleurs, la position des points par rapport à la droite constitue un critère d’aide à la décision. Ainsi, lorsque un titre est au-dessus de la droite de marché, cela traduit le fait que le taux de rentabilité exigé est trop élevé par rapport à son risque. Des investisseurs vont s’en rendre compte, l’acheter, faisant ainsi baisser son taux de rentabilité exigé et donc monter son cours. Un titre en dessous de la droite de marché apparaît comme surévalué dans le modèle.
V.3. LA RENTABILITE EXIGEE PAR UN INVESTISSEUR
Développé à la fin des années 50 et pendant les années 60 à partir des travaux de Harry Markowitz, William Sharpe, John Lintner et Jack Treynor, le Médaf ou CAPM en anglais est aujourd’hui universellement appliqué.
Il part de l’hypothèse que les investisseurs sont rationnels et bénéficient tous de la même information sur les titres. Ceux-ci se comportent comme un investisseur cherchant pour un niveau de risque donné à maximiser leur rentabilité. Ils détiennent tous le même portefeuille, le portefeuille de marché, qui contient chaque titre en proportion de sa capitalisation boursière.
La Capital Market Line (CML) nous indique la relation entre la rentabilité d’un portefeuille et son risque. Le MEDAF a pour objectif de transposer cette relation au niveau d’un titre individuel et non plus d’un portefeuille, de sorte à connaître la rémunération qui doit être exigée sur ce titre en fonction de son risque.
Pour minimiser son risque total, chaque investisseur cherchera à réduire la composante qui peut être réduite, c’est-à-dire le risque spécifique. Pour cela, l’investisseur diversifiera son portefeuille.
A l’équilibre, l’investisseur ne sera rémunéré que pour la partie de risque qu’il ne peut pas éliminer, c’est-à-dire le risque de marché non diversifiable. En effet, dans un marché où des opérations d’arbitrage sont toujours potentiellement possibles, il ne pourra pas être durablement rémunéré pour un risque qu’il a la possibilité d’éliminer lui-même, en diversifiant tout simplement son portefeuille.
Ceci signifie que la rentabilité exigée par un investisseur est égale au taux de l’argent sans risque (RF) majoré d’une prime uniquement liée au risque non diversifiable, c’est-à-dire au risque de marché.
On montre que cette proposition se traduit par :
Taux de rentabilité exigé = Taux de l’argent sans risque + β * Prime de risque de marché
E (Rp) = RF + βp [ E(RM ) – RF ]
V.4. LE BETA ET LES PRIMES DE RISQUE
V.4.1. Le calcul du bêta
Le risque d’un titre est mesuré par son bêta (la lettre grecque β). Techniquement, le bêta d’un titre représente le gain marginal apporté par la rentabilité du titre à l’écart type global du portefeuille. La formule du bêta pour le titre j est la suivante : βj = σjM /σ²M où σjM est la covariance entre la rentabilité du titre j et la rentabilité du marché (ou du portefeuille de marché).
β = (1/N.ΣRX.RM – RX.RM) / 1/N.ΣRM² - RM² = (Cov(RX,RM) / Var (RM)
V.4.2. Les paramètres qui expliquent le bêta
Pour un titre donné, les paramètres suivants expliquent le niveau du coefficient bêta.
V.4.2.1. La volatilité de la valeur de l’actif économique
Plus la volatilité de la valeur de l’actif économique est forte, plus le β du titre est élevé. La volatilité de la valeur de l’actif économique dépend du secteur de l’entreprise et de la structure de ses coûts d’exploitation. Plus l’entreprise est proche de son seuil de rentabilité, plus son β est élevé.
V.4.2.2. La structure financière
La structure financière d’une entreprise a une influence certaine sur le niveau du point mort et donc sur la volatilité de ses bénéfices nets, et donc sur le β de ses actions à travers le mécanisme de l’effet de levier. Plus la société est endettée plus le β de ses actions est élevé.
V.4.2.3. La qualité de l’information fournie au marché
La qualité de la gestion et, plus particulièrement, la lisibilité et la quantité d’information que possède le marché sur une entreprise ont une influence directe sur le β. Toutes choses égales par ailleurs, moins nombreuses et moins bonnes sont les informations que donne une entreprise sur son évolution, plus le β de ses titres est élevé car le marché tiendra compte d’un risque de « non-visibilité ».
V.4.3. Interprétation de la valeur de bêta
Le bêta est aussi une mesure de la sensibilité de la rentabilité d’un titre par rapport à la rentabilité du marché. Ainsi, si la rentabilité du portefeuille de marché est supérieure de Y % à ce qui était anticipé alors la rentabilité du titre j va tendre à être βj * Y % supérieure à la rentabilité anticipé sur le titre j. Les titres avec un bêta élevé (supérieure à 1) sont dits « agressifs », ou dynamiques, car leurs rentabilités tendent à amplifier l’évolution de la rentabilité du marché, augmentant plus que le marché en cas de hausse boursière, et baissant plus que le marché en cas de tendance baissière. Inversement, les titres avec un bêta peu élevé (inférieure à 1) sont appelés des titres « défensifs ». Le portefeuille de marché a, par définition, un bêta de 1, et les titres qui ont un bêta de 1 sont dits « de risque moyen ».
V.5. LES UTILISATIONS DU MEDAF
Le MEDAF possède plusieurs utilisations.
V.5.1. Evaluation du coût du capital
Soit une société dont les actions se caractérisent par un β = 1,2. Supposons que
E(RM) = 11 % et RF = 7 %.
Le taux de rentabilité exigé par les actionnaires qui engageraient des fonds dans cette société serait :
V.5.2. Choix d’un investissement
Le problème consiste à calculer la rentabilité requise, puis à la comparer à la rentabilité du projet ou à l’utiliser pour calculer la valeur actuelle nette.
Soit le projet d’investissement suivant :
On estime le β de cet investissement à 1,75 et l’espérance mathématique de la rentabilité du marché à 8 %. Le taux sans risque est de 4 %.
Le projet est-il rentable ?
Calculons la rentabilité requise
Calculons le taux de rentabilité interne du projet
Conclusion
V.5.3. Evaluation de la performance du portefeuille
Comme tout investissement, la performance du portefeuille doit être évaluée. Mais cette évaluation doit tenir compte du fait que le portefeuille est plus ou moins risqué et que toute prise de risque demande à être rémunérée en proportion.
V.5.3.1. L’alpha de Jensen
Nous savons que la formule du MEDAF est : E (Rp) = RF + βp [ E(RM ) – RF ]
L’alpha de Jensen va être obtenu en régressant les rentabilités passées (en excès du taux sans risque) du portefeuille sur les rentabilités passées (en excès du taux sans risque) du marché : Rp,t - RF,t = αp + βp [ E(RM,t ) – RF ] + εt
Où Rp,t .est la rentabilité du portefeuille à la date t, RF,t la rentabilité de l’actif sans risque à la date t, RM,t la rentabilité du marché (dans la pratique d’un indice) à la date t, et εt le résidu de la régression.
La régression permet d’obtenir les valeurs de αt et βt. Cet alpha s’analyse comme le rendement du portefeuille en excès de ce qui est prédit par le MEDAF.
V.5.3.2. Le ratio de Teynor
Tout comme l’alpha de Jensen, le ratio de Treynor est dérivé du MEDAF. Si le rendement dégagé par le portefeuille est conforme au rendement attendu dans le cadre du MEDAF, il devient possible de réécrire ex post ce dernier :
E (Rp) = RF + βp [ E(RM ) – RF ] → (Rp – RF) / βp = RM - RF
Or, nous savons que le portefeuille de marché à un bêta égal à 1, d’où
(Rp – RF) / βp = (RM – RF) / βM
Le ratio de Treynor correspond à la partie gauche de cette égalité : Tp = (Rp – RF) / βp
Un ratio de Treynor supérieur à (RM – RF) signifie que la performance du portefeuille a été supérieure à celle du marché
V.5.3.3. Le ratio de Sharpe
Contrairement aux deux précédentes mesures, qui ne tiennent compte que du risque systématique (au travers du bêta), le ratio de Sharpe prend en compte le risque total, mesuré par l’écart-type des rentabilités : Sp = (Rp – RF) / σp
V.6.LES LIMITES DU MEDAF
Le MEDAF reposant sur la théorie d’efficience des marchés, est sans conteste, le modèle le plus utilisé en finance moderne. Mais, nous pouvons remarquer que chaque point du MEDAF pose un problème pratique.
V.6.1. Les difficultés de l’application pratique du MEDAF
La première difficulté dans la mise en pratique du MEDAF est la détermination du taux sans risque, qui est une notion théorique. D’une part, aucun actif disponible sur le marché n’est réellement sans risque. (chaque pays présente un risque de non solvabilité, même faible). D’autre part, le taux d’intérêt à un mois n’est pas égal au taux d’intérêt à 5 ou 10 ans. Or le choix du taux sans risque nécessite la détermination d’un horizon. Dans la réalité, le MEDAF s’applique sur une seule période, courte, ce qui est une limite forte.
ROLL a fait remarquer que la détermination du portefeuille de marché n’est pas si simple qu’on voudrait le penser. En théorie, le portefeuille de marché n’est pas uniquement constitué d’actions, ni même d’actif financier. Il est déterminé à partir de tous les actifs que l’on peut acquérir, ce qui rend sa détermination en pratique impossible, en particulier lorsqu’on raisonne d’un point de vue international (biais levé pas la diversification).
L’autre difficulté réside dans la détermination de la rentabilité espérée du portefeuille de marché. Le MEDAF est un modèle prévisionnel. Il permet de calculer la rentabilité espérée d’un titre particulier à partir de la rentabilité anticipée du portefeuille de marché et du risque anticipé du titre (son β). Or les données anticipées ne sont pas observables de manière simple sur le marché. Il faut réaliser des prévisions à partir des données historiques et des données macroéconomiques, et pour certains pays, ceci est loin d’être simple.
V.6.2. L’instabilité du bêta
La principale critique que l’on peut adresser au bêta est son instabilité dans le temps. Il synthétise en une seule donnée un grand nombre d’information et cette force devient sa faiblesse.
Le MEDAF est un modèle prévisionnel, il permet de calculer des espérances de rentabilité à partir d’anticipations de risque. Pour l’utiliser, il faudrait donc, en théorie, utiliser un β prévisionnel et non historique, d’autant plus que ce coefficient n’est pas stable dans le temps.
Pour cette raison, son calcul est fréquemment redressé pour tenir compte de la régularité des bénéfices et des dividendes, de la visibilité du secteur,… Certaines études cherchent à démontrer une convergence des β vers 1.
V.6.3. Les limites théoriques du MEDAF et des marchés en équilibre
Le MEDAF repose sur la théorie des marchés en équilibre. Or l’équilibre des marchés peut être mis en cause. Le développement de l’analyse technique en salle de marché répond aux doutes des intervenants sur l’efficience des marchés.
Or la théorie d’efficience des marchés en général et donc le MEDAF en particulier reposent sur le postulat que les intervenants du marché ont des anticipations rationnelles. Cela signifie que, pour être applicable, le modèle doit être accepté par tous, comme universellement exact. Le développement des théories parallèles est la preuve que cet axiome n’est pas vérifié entièrement.
La force du MEDAF réside dans sa simplicité de mise en œuvre et son fort caractère intuitif. Pour autant, bien que son utilisation soit généralisée au sein de la communauté financière, il fait l’objet d’un certain nombre de critiques :
- la non-testabilité du MEDAF : il n’est pas possible de tester les prédictions du modèle car la rentabilité anticipé qu’il est censé prédire n’est pas une donnée observable. En toute rigueur, il faudrait pouvoir confronter la rentabilité anticipée estimée dans le cadre du MEDAF à la rentabilité anticipée réelle et voir s’il existe un écart. Or il n’est pas possible de quantifier la rentabilité qui est espérée par chaque investisseur pour chaque investissement qu’il réalise. Pour remédier à ceci, les études font l’hypothèse que les investisseurs font des anticipations rationnelles, ce qui permet d’utiliser les rentabilités passées à la place des rentabilités qui étaient espérées.
- le portefeuille de marché : selon le modèle, le portefeuille de marché est une combinaison pondérée de l’ensemble des actifs disponibles, qu’il s’agisse des actions ou des obligations, mais également des autres types d’actifs, tels que les biens immobiliers, les œuvres d’arts… Dans la pratique, il n’existe pas d’indicateur représentatif d’un tel ensemble, ce qui conduit à retenir des indices boursiers pour le calcul de la prime de risque du marché et du bêta.
- le bêta comme facteur de risque : en 1992, Eugène Fama et Kenneth French ont montré que deux variables pouvaient expliquer la rentabilité des actions de la société et son ratio Book-to-Market (valeur comptable des capitaux propres sur la capitalisation boursière). Ils observent que la prise en compte de ces deux facteurs rend le bêta sans intérêt dans la prévision des rentabilités futures
- la stabilité du bêta : dans le cadre du MEDAF, le bêta représente une mesure de la rentabilité anticipée du titre, compte tenu de celle du marché. Or comme cette dernière n’est pas mesurable, ceci conduit à estimer le bêta sur la base des données passées.
- l’estimation du bêta : le bêta qui est estimé par régression n’est qu’une approximation du « vrai » bêta de l’action. Or, selon qu’il est estimé à partir des données quotidiennes, hebdomadaires ou mensuelles, le bêta qui sera obtenu sera différent. Il en va de même lorsque l’on fait varier la période d’étude ou l’indice représentatif du marché.
V.7. LES MODELES DE MARCHES MULTIFACTEURS
V.7.1. Principe
Dans le MEDAF, le risque est apprécié au travers de bêta, qui mesure la variation de la rentabilité d’un titre pour une variation de 1 % de la rentabilité du marché.
Les modèles multifacteurs font l’hypothèse que la rentabilité d’un titre est dépendante d’un certain nombre de facteurs de nature économique : le produit national brut, le cours d’une devise, le prix du pétrole,…
Ainsi, la prime rémunérant le risque se trouve fractionnée entre les différents facteurs retenus et l’on associe β à chaque facteur.
V.7.2. Modèle factoriel à deux facteurs et rentabilité espérée
V.7.2.1. Principe
Si l’on retient deux facteurs, la rentabilité espérée d’une action i s’exprime de la manière suivante : E (Ri) = RF + βi1P1 + βi2P2
Avec : RF = Taux de rentabilité de l’actif sans risque
βi1 = Coefficient de sensibilité du titre i à une variation du facteur 1
P1 = Prime de risque relative au facteur 1,…
Soit une action A dont la rentabilité dépend de deux facteurs : le produit national brut et les taux d’intérêt.
Le taux de l’actif sans risque est de 4 %. Les coefficients de sensibilité et les primes de risque afférents aux deux facteurs sont donnés dans le tableau ci-dessous :
Calculer l’espérance de rentabilité de cette action
V.7.2.2. Généralisation : les modèles alternatifs de tarification du risque
Plusieurs modèles ont été proposés à la suite du MEDAF afin de remédier à certaines des critiques qui lui sont adressées, mais leur utilisation reste encore limitée. Les deux modèles les plus utilisés sont le modèle d’évaluation par arbitrage (MEA) ou APT (Arbitrage Pricing Theory) et le modèle de Fama et French. Les prémisses de ces deux modèles sont identiques. La rentabilité espérée d’un titre trouve probablement origine dans plus d’un facteur, contrairement à ce que suppose le MEDAF. Ils ne remettent pas en cause la relation rentabilité-risque mais le fait que le risque à retenir s’expliquerait uniquement par le facteur bêta.
V.7.2.2.1. Le modèle APT
Ce modèle a été élaboré par Stephen Ross en 1977. Contrairement au Médaf, le MEA postule que la rentabilité d’un actif est fonction de plusieurs facteurs de risque et non d’un seul (le bêta). Ces facteurs de risque sont à l’origine du risque systémique (non diversifiable) du titre et sont associés à une prime de risque qui leur est propre. Hélas, cette théorie ne précise ni leur nombre, ni leur identité. Dans la pratique, il peut s’agir du prix du pétrole, des taux de change.. La rentabilité du titre i peut être formulée comme suit :
Ri = RF + βi1(R1 – RF) + βi2(R2 – RF) + …+ βin(Rn – RF)
La partie de droite présente les facteurs qui expliquent cette prime. A chaque facteur sont associés une prime et un bêta. Le problème de la méthode réside dans le fait qu’une corrélation n’est pas un lien de causalité et qu’il est possible d’observer que statistiquement, un facteur a un impact sur la rentabilité des titres, sans qu’il existe pour autant un lien de causalité.
V.7.2.2.2. Le modèle de Fama et French
Deux universitaires américains, Eugène Fama et Kenneth French, ont développé un « modèle » dans l’esprit du précédent à ceci près que les facteurs sont ici identifiés. Pour cela, ils observent que deux facteurs sont systématiquement liés à la rentabilité des titres : la taille de la société et le ratio rapportant la valeur comptable de ses capitaux propres sur la valeur de marché (ratio book-to-market). La taille de la société est mesurée par la valeur de marché de ses capitaux propres.
L’idée sous-jacente au second facteur (B-to-M) est que si la valeur de marché des capitaux propres (Market value) est supérieure à leur valeur comptable (Book value), c’est que le marché est optimiste quant à l’avenir de la société, et inversement. Un fort B-to-M et donc mauvais signe et traduit un niveau de risque élevé. L’exigence de rentabilité n’en sera que plus élevé.
Leur modèle se présente ainsi :
Ri - RF = αi + βi1(Rm – RF) + βi2(Rsmall – Rbig) + βi3(Rhigh – Rlow)
Ainsi, la prime de risque d’un titre i est égale à une valeur constante (α) à laquelle il faut ajouter trois primes de risque. La première est égale à la prime du risque de marché (Rm – RF), ajustée de la sensibilité du titre (βi1 ) aux variations de ce dernier. La deuxième est une prime de risque de taille (Rsmall – Rbig), ajustée de la sensibilité du titre à ce facteur taille βi2. Enfin, le troisième correspond à la prime liée à l’effet book-to-market (Rhigh – Rlow), ajustée de la sensibilité du titre à cet effet (βi3 ).
CHAPITRE VI. : L’EFFICIENCE DES MARCHES
L’étude de l’efficience des marchés financiers est au cœur de la finance moderne. Le problème est le suivant : dans quelle mesure le cours de l’action sur le marché, est-il l’expression exacte de la situation effective de l’entreprise ?
On définira un marché efficient comme un marché imaginaire dans lequel le cours de l’action est, en permanence, le reflet exact, en milieu boursier, de l’entreprise réelle, en chair et en os, dans son environnement véritable.. Le cours exprime toute la vérité, rien que la vérité sur l’entreprise. Il est une sorte d’image fidèle (qui n’a rien à voir avec l’image comptable).
On dit qu’un marché est efficient si les cours reflètent rationnellement et à tout moment l’intégralité de l’information disponible.
VI.1. LES CONDITIONS DE L’EFFICIENCE
- Aucun investisseur ou décideur ne conserve pour lui seul une information susceptible d’influer les cours
Le respect de cette condition dépend essentiellement des contrôles exercés par les autorités du marché (sanctionner les délits d’initiés)
- Les investisseurs sont rationnels : ils sont supposés avoir un comportement cohérent, non fantaisiste et être en mesure d’exploiter de façon totalement rationnelle les informations qui leur parviennent ;
- Le coût des transactions est faible : les transactions effectuées sur les marchés financiers s’accompagnent de frais prélevés par les intermédiaires
L’efficience des marchés est d’autant plus grande que le coût des transactions est faible.
VI.2. LE MODELE GENERAL DE MARCHE EFFICIENT
Il s’agit d’un schéma de fonctionnement des marchés financiers. Comme tous les modèles, le point de départ est constitué par des hypothèses simplificatrices d’où l’on peut déduire, par des enchaînements logiques un certain nombre de conséquences permettant de mieux comprendre la réalité (modèle positif) ou de prendre de meilleurs décisions (modèle normatif). Un même modèle peut être à la fois positif et normatif. C’est le cas du modèle de marché efficient.
VI.2.1.L’hypothèse de départ
On définit un marché efficient comme étant un marché dans lequel l’information nouvelle est incorporée instantanément et complètement dans le cours des actions.
VI.2.1.1. La définition de l’information nouvelle
L’information nouvelle est une information qui ne peut pas être déduite de l’information ancienne : elle est strictement imprévisible, complètement aléatoire, absolument non corrélée avec l’information déjà connue.
L’annonce, immédiatement après leur survenance de l’incendie d’une usine, de la mort brutale d’un directeur de société dans un accident d’avion, ou d’un tremblement de terre sont des informations non prévisibles, complètement aléatoires et qui provoquent une surprise totale.
VI.2.1.2. L’incorporation de l’information nouvelle dans le cours de l’action
Le modèle d’efficience des marchés suppose que chaque investisseur prend connaissance de l’information nouvelle qui vient d’être publiée, qu’il est capable de l’interpréter et d’en tirer une conclusion sur l’incidence qu’elle aura sur le cours de l’action. Chacun prend alors une décision qui découle de sa propre conclusion : achat de l’action concernée, vente, abstention. A la suite de cette multitude d’ordres d’achat et de vente simultanés, s’établit un nouveau cours de l’action (cours unique) : on dit alors que l’information nouvelle est incorporée dans le cours de l’action.
VI.2.1.3. L’incorporation instantanée et complète
La vitesse avec laquelle l’information nouvelle est incorporée dans le cours du titre est un élément fondamental de l’hypothèse d’efficience des marchés. Cette vitesse est fulgurante, plus grande que celle de la lumière. L’incorporation de l’information nouvelle a lieu tout entière dans la première cotation qui suit l’annonce de la nouvelle. Si la publication a lieu pendant une période de fermeture de la bourse (fin de semaine,..), l’incorporation se fait au prochain cours d’ouverture.
VI.2.2. Les conséquences logiques de l’hypothèse de départ
L’hypothèse d’incorporation instantanée et complète des informations nouvelles dans le cours des actions, hypothèse qui définit un marché efficient, est riche de conséquences. Elles concernent le comportement des cours et celle des investisseurs.
VI.2.2.1. L’existence d’un marché efficient implique des variations aléatoires des cours
Si un marché est efficient, l’information ancienne a déjà été incorporée dans le cours. Seule l’information nouvelle, provoque une variation de cours. Comme cette information nouvelle est aléatoire et totalement indépendante de l’information passée, les variations de cours qui en résultent sont, elles aussi, totalement aléatoires et indépendantes des variations passées. Le grand théoricien des marchés efficients, Fama, a employé l’expression de marche au hasard pour décrire l’évolution du cours des actions sur un marché efficient : on dit que le cours de l’action suit un processus de Markov.
VI.2.2.2. L’existence d’un marché efficient implique la détermination d’un cours unique à partir d’un ensemble donné d’information
Sur un marché efficient, il n’y a pas, à la suite de la publication d’une nouvelle, d’abord des optimistes qui réagissent très vite et provoquent une forte hausse, puis des pessimistes qui réagissent un peu plus tard et provoquent une baisse qui suit la hausse. Sur un marché efficient optimistes et pessimistes ont réagi simultanément : il en résulte de la combinaison de leurs différentes réactions, un cours unique qui se maintient tant qu’une autre nouvelle n’intervient pas.
VI.3. LES DIFFERENTES FORMES D’EFFICIENCE
Fama le premier, puis différents auteurs par la suite, ont considéré le concept d’efficience des marchés c’est-à-dire d’incorporation immédiate et complète de l’information par rapport à différents types d’information. Ils ont ainsi distingué trois types d’information correspondant à trois formes d’efficience.
VI.3.1. La série chronologique des cours passés et la forme faible d’efficience
L’hypothèse qui est faite est que le cours présent du titre incorpore complètement cette catégorie particulière d’information qui est constituée par l’ensemble des cours passés du titre. En revanche, toute variation du cours à partir du cours présent est strictement indépendant des cours passés. Il y a indépendance des variations successives des cours. Ceux-ci évoluent selon un processus de marche au hasard.
L’information se limite à celle contenue dans les cours passés.
VI.3.2. L’ensemble des informations rendues publiques et la forme semi-forte d’efficience
Cet ensemble d’information contient n’importe quelle information. Cette information inclut naturellement l’ensemble des cours passés. Ce qui implique que si un marché est efficient selon la forme semi-forte, il est forcément efficient selon la forme faible.
La seule contrainte qui délimite l’information que doivent refléter les cours des actions pour que le marché soit qualifié d’efficient selon la forme semi-forte est que l’information doit être publique, c’est-à-dire portée à la connaissance de l’ensemble du public. Il est supposé que la même information est diffusée instantanément à l’ensemble du public. C’est à cette forme semi-forte que nous nous sommes référés dans le modèle général de marché efficient.
L’information contient également l’information publique disponible (presse, notamment).
VI.3.3. L’ensemble des informations existantes y compris les informations privilégies et la forme forte d’efficience.
La modification de l’hypothèse, par rapport à la situation précédente, est que l’on considère ici la totalité de l’information existante, publique ou privée, diffusée à l’ensemble du public ou possédée en grand secret par un nombre très limité de privilégiés. L’information nouvelle est immédiatement et complètement incorporée dans le cours dès qu’une seule personne en a connaissance. Selon cette forme forte, les secrets sont impossibles à garder, les tuyaux sont percés, les murs ont des oreilles, les imitateurs imitent même quand ils ne savent rien.
Toute l’information possible, publique ou privée (études des analystes financiers, des fonds de roulement,…) est considérée.
VI.4. LES RESULTATS DES MODELES THEORIQUES
Un certain nombre de modèles théoriques ont été développés afin d’anticiper la façon donc les prix se forment sur les marchés et ainsi de comprendre l’influence des transactions d’agents informés sur l’équilibre final et sur l’efficience informationnelle. Ces agents informés peuvent être des investisseurs initiés, agissant de façon illicite, mais aussi des analystes financiers ayant collecté et retraité de l’information publique pour en retirer de l’information privée et agissant en toute légalité.
Grossman (1976) étudie les problèmes d’asymétrie pouvant exister entre les différents investisseurs et montre, grâce aux concepts de la théorie des équilibres rationnelles, que la seule observation des prix cotés peut permettre l’élimination des asymétries d’information existant entre informés et non informés. Un agent ayant connaissance d’une information laissant présager une évolution favorable du cours du titre va acheter ce titre. Cette augmentation de la demande pousse le prix coté à la hausse et l’observation des variations de cours permet aux autres agents de déduire l’information privée.
Grossamn et Stiglitz (1980) soulignent un paradoxe : les prix ne peuvent être parfaitement révélateurs si l’acquisition de l’information est coûteuse. En effet, aucun investisseur ne serait prêt à engager des dépenses pour devenir informé si les prix d’équilibre reflétaient déjà toute l’information disponible. Dès lors, l’intervention d’investisseurs supérieurement informés conduit à améliorer l’efficience informationnelle car leurs transactions contribuent à l’incorporation de la totalité de l’information privée dans les cours. Ceci étant, le prix qui s’établit contient certe de l’information, mais également une composante de bruit. Il ne permet donc plus aux non-informés d’inférer parfaitement le signal qui est à l’origine de l’échange des informés.
Bien que la révélation de l’information privilégiée puisse être limitée par de multiples facteurs, l’intervention d’agents supérieurement informés conduit à incorporer leur information privée dans les cours, ce qui a un impact positif sur le contenu informationnel des cours et sur l’efficience informationnelle.
Cependant, l’efficience informationnelle ne dépend uniquement de la quantité d’information privée intégrée dans les cours, mais aussi de la vitesse à laquelle l’information publique est incorporée dans les prix. La présence d’initiés sur le marché n’est pas sans conséquence sur le comportement des différents investisseurs. Elle peut les décourager d’intervenir sur le marché.
VI.5. LES ANOMALIES ET LES BULLES SPECULATIVES
Depuis une vingtaine d’années, les résultats mis en évidence par un certain nombre d’études empiriques remettent en cause l’efficience informationnelle du marché boursier, en soulignant plusieurs types d’anomalies et l’existence de bulles spéculatives.
VI.5.1. Les anomalies boursières
Les anomalies prennent notamment la forme de saisonnalité des rentabilités, dites « anomalies calendaires ».
- L’effet lundi est marqué par une rentabilité des titres inférieure (voire négative) le lundi par rapport à celle observée les autres jours de la semaine, alors qu’elle devrait représenter trois fois la rentabilité des autres jours si elle était proportionnelle à la durée de détention des titres (le lundi et les deux jours du week-end). Cette anomalie est aussi appelée effet week-end ;
- L’effet fin de mois (Ariel, 1987) se traduit par une rentabilité des actions plus importante pendant la première quinzaine d’un mois donné et quasi nulle pendant la seconde quinzaine. Une autre étude montre l’existence de rentabilités anormales positives sur les trois derniers jours et les trois premiers jours de chaque mois (Lakonishok et Smidt, 1988).
- L’effet janvier ou effet fin d’année se traduit par le fait que les actions ont tendance à avoir une rentabilité supérieure les premiers jours de janvier. Cette anomalie pourrait s’expliquer sur certains marchés par la fiscalité, les investisseurs pouvant avoir intérêt à réaliser leurs moins values (en cédant les titres concernés) et à différer l’imposition de leurs plus-values (en ne cédant pas les titres).
- L’effet taille montre que la rentabilité des entreprises de petites capitalisation est supérieure à celle des grandes. Cet effet aurait tendance à disparaître dès lors qu’il est mis en évidence ;
- Enfin, Basu (1977) a mis en évidence le fait que plus le PER de l’action est faible, plus sa rentabilité est forte (effet PER).
VI.5.2.Les bulles spéculatives
Les bulles spéculatives s’observent lorsque le cours coté s’éloigne progressivement de la valeur fondamentale du titre, jusqu’à l’éclatement de la bulle qui se traduit par une forte chute du cours. Les bulles spéculatives remettent en cause l’hypothèse d’efficience des marchés financiers. Elles résultent du comportement excessif des spéculateurs qui ne cherchent pas seulement à évaluer le titre à sa juste valeur mais qui tentent d’anticiper le comportement et les anticipations des autres investisseurs. Elles peuvent aussi se justifier par des comportements de mimétisme entraînant des phénomènes de sur-évaluation.
Il existe trois types de bulles :
- les bulles rationnelles expliquées par le comportement mimétique des investisseurs ;
- les bulles informationnelles, justifiées par l’asymétrie d’information existant entre les différents intervenants sur le marché financier :
- les bulles irrationnelles, caractérisées par la non-rationalité des investisseurs et des divergences d’interprétations d’une même information.
Ces différentes anomalies et bulles spéculatives semblent remettre en cause l’efficience des marchés et laissent supposer que les investisseurs ne sont pas rationnels. La finance comportementale, relâchant l’hypothèse de rationalité parfaite, tente de trouver des justifications aux anomalies observées.
CHAPITRE VII. QUESTIONS DE REFLEXION
Quelle est la mesure du risque en économie de marché ?
Que mesure le coefficient β ?
Le coefficient β mesure le risque spécifique d’un titre. Vrai ou faux ?
De quoi dépend le coefficient β ?
L’augmentation de l’endettement d’une société a-t-il pour effet de réduire ou d’accroître la volatilité des cours de son action ?
A quelles conditions un actif sans risque est-il sans risque ? Donner un exemple. Est-il vraiment sans risque ?
Plus le nombre d’actions dans un portefeuille est important plus la contribution marginale supplémentaire à la diversification est faible. Vrai ou faux ?
Une diversification très poussée permet-elle d’éliminer le risque spécifique ? le risque de marché ?
Pouvez-vous, en quelques lignes, expliquez pourquoi le risque diversifiable ne peut-être rémunéré dans les marchés en équilibre ?
Quel est le défaut du coefficient β ?
11)Quel est le taux de rentabilité à exiger sur l’action PIGALLE dont le β est de 0,7 si l’action de CHORON dont le β est de 1,1 rapporte 10 % et qu’elle est correctement évalué, alors que le taux de l’actif sans risque est de 5 % ?
12) Indiquez si les actions suivantes sont sous évalués, correctement évaluées ou surévaluées, sachant que le taux de l’actif sans risque est de 5,5 % et la prime de risque de marché 4.
13) Vous pensez que l’action ALBONI.COM voudra 40 F dans un an. Quels prix êtes-vous prêt à la payer aujourd’hui si le taux de l’argent sans risque est de 5 %, le taux de rentabilité de marché 9 % et que son β est de 2,7 ?
14) Une entreprise possède plusieurs portefeuilles caractérisés comme suit :
Représentez sur un graphique les portefeuilles
Quels sont les portefeuilles efficients et ceux non efficients ?
Supposons que vous puissiez emprunter ou prêter au taux de 10 %. Quel portefeuille choisirez-vous ?
Supposons que vous soyez prêt à accepter un écart-type de 25 %. Quelles est la rentabilité attendue maximum que vous réaliser si vous ne pouvez ni emprunter ni prêter ?
15) VRAI OU FAUX ?
a) Dans le Médaf, un investissement de béta négatif offre une rentabilité attendue inférieure au taux d’intérêt.
b) La rentabilité attendue d’un investissement de béta égal à 2 est le double de la rentabilité attendue du marché.
c) Une action situé en dessous de la droite est sous-évaluée.
16) Un investisseur détient un portefeuille calqué sur la composition de l’indice SBF 120 ; il pose, en outre, des prévisions suivantes :
E (RM) = 8 % ; σRM = 2 % ; rendement de l’actif sans risque = 6 %
Il envisage de céder une fraction α de son portefeuille pour l’investir dans l’actif sans risque de manière à ce que l’espérance de rentabilité du portefeuille soit de 7 %.
Quelle est la valeur du β du portefeuille actuel ?
Quelle sera, exprimée en fonction de α, la valeur du β du nouveau portefeuille ?
Calculer α
Déterminez le risque du nouveau portefeuille
17) Une personne souhaite investir 60 % des capitaux dont elle dispose dans l’action A dont les caractéristiques sont : E (RA ) = 12 % ; σRA = 15 %
Pour avoir un portefeuille diversifié, elle souhaite placer le reste de ses capitaux dans un actif sans risque dont le taux de rentabilité est de 9 % (taux constant, par définition, sur la période considérée).
Calculez :
L ‘espérance mathématique de la rentabilité du portefeuille ainsi constitué
Le risque de ce portefeuille
Quelles conclusions en tirez-vous ?
REFERENCES BIBIOGRAPHIQUES
Barreau J. et J. Delahaye (1999), Gestion financière, Economica, 8é éd., Paris, 489 P.
Bodie Z. et Merton R. (2007), Finance, Nouveaux Horizons, 2é éd., Paris, 558 P.
Burland A. (2009), Finance, Foucher, 3é éd, 507 P.
Delahaye J. et F Delahaye (2007), Finance d’entreprise, Dunod, Paris, 559 P.
Goffin R. (2001), Principes de finance moderne, Economica, 3é éd., Paris, 655 P.
Ly-Baro F. (2002), Structure financière de l’entreprise, Economica, Paris, 119 P.
Montoussé, M. (2006), 100 fiches pour comprendre la bourse et les marchés financiers, Bréal, Rosny, 222 P.
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